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"Leh’Cim-L’Ombre des Ramparts"
Didier Quesne

Editeur :
Nestiveqnen
 

"Leh’Cim-L’Ombre des Ramparts"
Didier Quesne



LEH’CIM
10/10

Jacques du Chesnoy et Amo forment un duo d’enquêteurs d’un genre nouveau. En effet, l’un est une sorte de Sherlock Holmes du surnaturel baignant dans l’esprit des lumières. L’autre pourrait être un Danro, un guerrier issu du pays du soleil levant, habile en armes blanches et esprit fort. Quand ces deux amis devant l’éternel se retrouvent devant les portes d’une ville où leurs talents ont été mandés, ils ne se doutent pas un seul instant qu’il vont être confrontés à un mal insigne tapi au coeur des pierres et au coeur des hommes. Chaque fois que les cloches entonnent leur chant lugubre, les habitants de cette contrée sont soudain pris d’une terreur sourde. Un monstre étrange fait entendre ses cris dans les nuits et prend possession des corps. Il rend les femmes folles et fait des hommes de véritables machines à tuer, invincibles et insensibles à la douleur. Et toujours ce mot lancinant qui pend à la bouche des trépassés : Leh’Cim. Les meurtres et actes de folies se multiplient et nos héros connaîtront dans ce voyage jusqu’au bout de la mort, du mal et de l’amour, leur propre destinée, chacun ayant au final sa propre part du mal, et le devoir de vivre avec.

Avec ce huitième roman paru chez Nestiveqnen, Didier Quesne nous donne un très beau récit médiéval qui évoque furieusement dans ses prémisses un film comme le Pacte des loups. Dans une langue qui épouse magnifiquement un vieux français dont l’usage n’a rien d’ennuyeux, l’auteur invente une ville perdue quelque part. "Néantissement" des topos, pas de vrais référentiels géographiques, cette mise en abîme renforce l’impact mythique et la facture fantastique. Les divers éléments de l’intrigue sont bien dosés, chaque personnage remplissant sa fonction symptomatique voulue par un scénario des plus élaborés au moyen d’une mécanique parfaitement articulée autour des deux héros, et du personnage d’Eline, seule à avoir survécu à Leh’Cim. Chaque attaque de la créature est précédée de divers signes, onomatopées, intuitions parfaitement mis en lettres par l’auteur. Les dialogues sont très bien équilibrés, sans les excès encourus souvent dans cet usage propre à pallier les carences d’une histoire qui manquerait à prendre son envol. Cela nous donne un policier médiéval fantastique, une Detective-medieval-horror story (cela va réjouir les adversaires des catégorisations) qui nous emmènera au bout de l’histoire d’un être ayant perdu son humanité, un reclus, une créature ayant aboli tout sentiment d’appartenance pour ce vouloir jouir, cette volonté de fusion, pathos de la possession qui se concrétiseront en la personne de la belle et énigmatique Elise.

L’auteur possède un don marqué pour la cinétique quand il s’agit de mettre en scène des combats, un art dans lequel les auteurs français ont longtemps eu des problèmes par rapport à leurs homologues anglo-saxons voir allemands (les cycles guerriers de Holbein qui est une sorte de Gemmell allemand) . Par contre, là où l’intrigue pêche un peu, c’est dans ce manichéisme stigmatisé en la personne de Leh’Cim, un axe qui aurait gagné à être aplani justement par cet humanisme affiché par Jacques, ce qui est un peu dommageable pour le reste de l’histoire. Mais la prose de l’auteur parvient à enlever l’adhésion quand à cette histoire qui détonne sur les productions du genre.

Audacieuse et élégante, la narration quelque peu imprégnée par certains aspects de la pensée Voltairienne, est des plus délectable, et l’amitié entre les deux personnages que sont Jacques et Amo est l’une des plus belles mis en scène dans la fantasy, qu’elle soit d’ici ou d’ailleurs. Enquête médiévale motivée par des considérations philosophiques sur la religion, le monstrueux moral ou/et physique, l’amitié, la mort, l’amour et ce "vouloir vivre plus que tout" font de Leh’Cim une réussite totale. Didier Quesne est tout simplement l’un des plus remarquables écrivains de la fantasy française. Un très grand roman qui, en très peu de pages, installe définitivement l’auteur au panthéon de cette fantasy française qui peinait tant jadis à trouver ses marques. Hormis le piège du manichéisme dans lequel l’auteur tombe, ce roman est à classer parmi les meilleurs de l’année 2004. Encore un récit qui mériterait une traduction en langue anglaise............

leh’Cim, L’Ombre des Ramparts, Didier Quesne, couverture de Sandrine Gestin, 220 Pages, Nestiveqnen, 13,50 €





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