Je n’avais pas la moindre idée de la façon dont je pouvais encore assumer mon rôle au sein de l’Éducation nationale... et patriotique. L’instituteur qui tirait les oreilles des cancres avait bien pelleté quelque part dans les charniers d’Auschwitz-Birkenau.

Juin 1945 : monsieur Georges revient de trois ans de déportation. Les habitants de son village ont tenu à faire une fête en son honneur. C’est l’occasion de faire bombance tout en plaignant le malheureux rescapé. C’est vrai que cela n’avait pas du être facile dans les camps de travail. Monsieur Georges rectifie : il s’agissait d’un camp d’extermination. Ah bon ? Ici non plus ce n’était pas facile. Monsieur Georges a t’il été averti de l’augmentation du prix du beurre ?
Après les expérimentations du docteur Mengele monsieur Georges retrouve la banalité des Flandres françaises. Or c’est dans ce cadre paisible que vient d’être commis un meurtre. Cet assassinat est en apparence impossible car personne n’aurait pu franchir le barrage de l’agressif molosse de la victime. Peu importe, les autorités ont trouvé un coupable idéal en la personne de Monsieur Georges.
Ce dernier préfère demander à l’enquêteur où il se trouvait un certain jour de 1942. En effet ce sont des gendarmes français qui ont emmené le déporté jusqu’au train qui l’a conduit jusqu’en Pologne.
Et puis à quoi bon l’interroger sur cet homicide après les dizaines de millions de morts de la seconde guerre mondiale ? Comment la civilisation a t’elle pu déboucher sur une telle barbarie ? Comment se fait-il que les trois quart des médecins allemands appartenaient au parti nazi ?
Les interrogations sur la nature humaine se doublent d’une recherche sur la résolution de l’énigme. En fait la découverte de l’identité du coupable passe par la recherche des moyens employés pour réaliser ce crime impossible.
Il est possible de faire le parallèle avec les romans de science-fiction de l’auteur. Gilles Warembourg utilise les mathématiques comme élément de l’intrigue, tout comme dans "L’Ellipse" où les anomalies mathématiques permettent de percevoir la réalité ou comme dans "L’oeil du Calamar" où l’analyse démographique permet de percevoir les anomalies et le destin de l’humanité.
Ici le thriller rural se double d’une efficiente présentation du mal.

Damien Dhondt

Auteur : Gilles Warembourg _ Flandre noire _ Edition : Ravet-Anceau _ janvier 2008 _ Inédit, poche, 224 pages _ 9 euros