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Scénario : Gary Young
Avec : Michael Caine, Emily Mortimer, Iain Glen, Liam Cunningham.
Distribué par Surreal Distribution.
103 mn.
Sortie le 12 Janvier 2011.
Note : 9/10.
Les grands acteurs disparaissent peu à peu, du moins ceux d’une certaine trempe, ceux qui durent depuis près d’un demi-siècle. Michael Caine, le plus britannique de tous, à l’humour so british, à la force impressionnante (dixit ses partenaires sur certains de ses films), à la coupe de cheveux parmi les plus hideuses jamais vues (surtout celle des années 70, sorte de vaguelettes qui faisait penser qu’il portait une perruque !), ce Michael Caine qui pouvait être un dragueur comme Alfie, un espion plus que cynique comme Harry Palmer, un gentleman-cambrioleur aux côtés de Sean Connery dans « La grande attaque du train d’or », un travesti psychopathe dans « Pulsions », ce même Michael Caine qui pouvait jouer dans un nanar comme « Les dents de la mer 4 » uniquement pour l’appât du gain et des vacances aux Bahamas (si, si, c’est lui qui le dit !), ou enfin, ce Michael Caine qui personnifia le tueur à gages par excellence dans « Get Carter » aujourd’hui considéré comme un des dix meilleurs films de l’histoire du cinéma britannique, ce Michael Caine demeure toujours un grand au point d’être même une des pierres angulaires du renouveau des Batman en incarnant Alfred ! Tout cela pour dire qu’au-delà de la première approche qu’on pourrait avoir d’un film comme « Harry Brown », qui est un pur vigilante-movie complètement assumé, Michael Caine apporte, par sa seule présence et implication dans le projet, une dimension supérieure...
Ancien soldat, Harry Brown est aujourd’hui un paisible retraité qui vit dans une banlieue de Londres. Son quotidien côtoie la violence générée par une délinquance de plus en plus violente. Harry reste à l’écart, ne voulant se mêler de rien, rester le plus discret possible, voir invisible. Un jour, la police vient lui annoncer que son vieil ami Leonard a été battu à mort. Malgré tout son chagrin, Harry continue sa vie. Mais un soir qu’il s’est laissé à boire, il se fait agresser par un junkie armé d’un couteau. Harry retrouve alors ses vieux réflexes acquis dans l’armée, et le tue. Le lendemain, Harry Brown va acheter une arme.
Avec un tel sujet, il eût été aisé de sombrer rapidement dans la caricature, voire une facilité très réactionnaire, à la Chuck Norris ou Steven Seagal dans leurs derniers rôles, tous plus pourris les uns que les autres au passage. Sauf qu’ici, tout tourne autour d’Harry Brown, cet ex-soldat aujourd’hui retraité, qui traîne dans son passé des choses certainement atroces qu’il veut oublier. Mais en même temps, il est certainement le seul à oser affronter les bandes, d’abord de façon civilisée puis définitive en s’aidant des armes et de ses « talents », une ultime solution pour lui qui succède à différents états d’âme qui le forcent à renouer ce qu’il essayait d’oublier. Voir Harry Brown refuser de répondre à la question de son meilleur ami sur le fait qu’il ait déjà tué une tierce personne, constitue une excellente scène qui cristallise un peu ce que veut montrer ce film. En vigilante, Michael Caine (né Maurice Micklewhite, au passage : il a bien fait de changer de nom !) donne à son personnage une dimension unique au film, plus intelligente, plus forte. Il sera alors aisé de cataloguer l’œuvre dans ce qu’elle peut révéler de pire, mais ce serait fermer les yeux sur un film qui ne fait pas l’apologie d’une façon de voir les choses. Au travers d’Harry Brown, alias un monsieur tout le monde par excellence (rien que dans son nom déjà...), il s’agit plus du reflet d’un des pires malaises actuels de certaines sociétés, où les écarts sociaux se creusent, où la délinquance existe parce qu’elle est construite sur une facilité perverse, et où à un moment donné, des Harry Brown vont se réveiller. Tout le film démontre adroitement cela, malgré de menus défauts (la femme flic, assez terne), et ce jusque dans la révélation finale qui restera dans le ton : la violence appelle la violence, qui n’arrive jamais par hasard. Par cette volonté de faire plus réaliste que spectaculaire, magnifiquement supporté par un très grand acteur, « Harry Brown » n’est pas le petit polar de série qui se fondra dans la masse : il marque le très grand retour de Michael Caine, et peut légitimement être considéré comme un des meilleurs polars du cinéma british, de la veine du must par excellence, le célèbre « Get Carter », avec Michael Caine justement. Un honneur pour « Harry Brown » d’être comparé à un tel classique, preuve s’il en est, de ses grandes qualités.
St. THIELLEMENT
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