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Avec : Clive Owen, Naomi Watts, Armin Mueller-Stahl, Brian F. O’Byrne.
Distribué par Sony Pictures Releasing France.
118 mn.
Sortie le 11 Mars 2009.
Note : 9/10.
A l’heure où les thrillers sont plus axés sur la démesure avec de l’action à 200%, pour un résultat qui peut aller du pire (l’immonde « Die Hard 4 ») au meilleur (la trilogie « Jason Bourne », le renouveau de James Bond avec « Casino Royale »), il est bon de temps en temps de découvrir un polar noir, ambitieux quant à son sujet, traité de manière très « Trois jours du Condor » (le mètre étalon du genre au début des années 70), mais revu et adapté à notre époque. Tout cela se retrouve dans le nouveau film de Tom Tikwer, cinéaste allemand dont on ne dira plus rien depuis qu’il a relevé et gagné haut la main le pari insensé de faire un film du roman « Le Parfum ». Certes, il n’en était pas à son coup d’effet dans le métier, il avait signé auparavant « Cours, Lola, cours », mais quand même, faire un film du « Parfum »... Bref, avec « L’enquête » (titre consternant, mais bon l’original en français, hein, ça sonnait moins bien que dans la langue de Shakespeare !), Tom Tikwer ajoute un nouveau succès à son tableau de chasse et pas des moindres : son film est un thriller politico-financier de très haute volée, avec de l’action très crédible pour une histoire si réaliste. Une réussite quasi-totale, qui flirte avec la note maximum...
Louis Salinger (Owen, parfait, comme toujours dans ce genre de rôle) travaille pour Interpol après avoir été viré de Scotland Yard et toujours sur la même affaire : les dessous de l’International Bank of Business and Credit. Sous des allures de banque mondiale, l’IBBC finance tout ce qui est illégal à très grosse échelle et est aussi spécialisée dans le blanchiment d’argent très sale. Travaillant en collaboration avec Eleanor Whitman du bureau du procureur de Manhattan, Salinger ne néglige aucune piste, même la plus ténue. C’est ainsi qu’après avoir failli réussir à obtenir les aveux d’un des financiers du groupe assassiné par un tueur à gages, Salinger découvre des liens secrets avec une riche famille italienne liée à la politique. Se lançant sur ces indices, il va remonter lentement jusqu’au dirigeant, jusqu’à des exécutants secrets et puissants, et pour réussir à faire tomber cet empire, Salinger devra franchir certaines lignes qui jusqu’ici le gardaient dans le droit de la loi et de la justice.
Que ça fait du bien, que ça fait du bien de se passionner pour une intrigue riche et intelligente et intense, servie par un casting en béton, avec un scénario qui conserve jusqu’au bout sa crédibilité sans jamais tomber dans les excès des films cités plus haut, le tout emballé par un cinéaste qui dès la scène d’ouverture nous plonge dans le bain de manière implacable. Ne laissant jamais tomber ni son histoire ni ses interprètes, Tom Tikwer donne vie à un complot financier noir monstrueux, dans lequel se débattent de pauvres enquêteurs intègres qui vont finir par tourner le dos à certaines règles pour arriver à un résultat. Mais de quel ordre : couper une tête et, schéma classique, telle une hydre, il en repoussera une autre. Qu’importe, l’enjeu est monumental, le suspense est grandiose, les scènes d’action se concentrent surtout sur une en particulier, magistrale, en plein cœur du musée Guggenheim de New-York. Et on y voit des tueurs n’hésitant pas à opérer à visage découvert, leurs commanditaires étant suffisamment puissants pour les payer un prix tel qu’ils peuvent se permettre tous les excès ! On aurait pu penser que tout le film ne serait qu’action de ce style, il n’en est rien : Tikwer construit son film, met en place ses personnages, organise son plan d’attaque, tout cela comme un stratège militaire, ne laissant rien au hasard, ne laissant strictement aucun répit aux témoins que nous sommes de ces jeux de pouvoirs et d’argent. C’est du thriller financier et policier de très haut niveau, parfaitement maîtrisé en tout, un digne héritier des meilleurs films du genre. Oubliez les catastrophes comme « L’interprète » qui tentait de retrouver aussi cette veine, laborieusement et désespérément, « L’enquête » est le premier depuis des années à réussir là où tant d’autres ont échoué. Le plaisir est total, jubilatoire, et ces deux heures constituent simplement une grande leçon d’excellent cinéma.
St. THIELLEMENT
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