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Réal. & scén. : Sylvester Stallone
Avec : Sylvester Stallone, Julie Benz, Paul Schulze, Graham McTavish.
Distribué par Metropolitan Filmexport
90 mn
Sortie le 6 Février 2008
Note : 9/10
Rambo, un nom devenu source de ringardise américaine, de tout ce que le pur yankee bien bourrin peut représenter, et ce surtout au travers de la première séquelle qui fit de Stallone la superstar d’un certain cinéma d’action des années 80. Au point de sur dimensionner un ego qui jusque là restait relativement modeste. A la suite de « Rambo 2 : la mission », Stallone poussa le bouchon encore plus loin avec undes plaisirs coupables cinématographiques les plus célèbres, « Cobra ». Prendre ce dernier au premier degré relève d’un cas de traitement psychologique d’urgence ; prendre un pied d’enfer à chaque vision est plus normal tant le film est la caricature involontairement comique de ce que Stallone devint à ce moment-là, épousant même la sculpturale Brigitte Nielsen qui voyait en lui le symbole de la toute puissance qu’elle recherchait. La suite, on la connaît, grandeur et décadence de la star (avec des œuvres telles que « L’embrouille est dans le sac » ou « Arrête ou ma mère va tirer », le pire du pire...), un regain amorcé avec « Cliffhanger » mais la chute du genre entraîna Stallone dans son sillage. Juste avant une fin qu’on pensait définitive (car Stallone ne se recycla pas comme Seagal, Van Damme ou Snipes, dans les sériées Z pour raves tournées en Europe de l’Est... Sage décision !), il livre un des plus beaux rôles de sa carrière avec le magnifique « Copland ». Et puis, il y a deux ans, celui dont on se moquait gentiment quand il parlait de clore la saga « Rocky » épata tout le monde : « Rocky Balboa » était un très grand film. Aujourd’hui, conscient de ce que le nom « Rambo » suscite, Stallone, d’abord lié contractuellement à ses producteurs, livre l’ultime volet des aventures de l’ancien soldat. Ils lui ont laissé le scénario et la réalisation, et pour l’acteur, c’est l’occasion ou jamais d’en terminer avec honneur, de ne pas tirer un trait sur les opus 2 & 3, mais simplement de revenir au premier film, modèle du genre, et de boucler haut la main la boucle en ce qui concerne Rambo.
John Rambo s’est retiré en Thailande. Il vit de petits travaux mécaniques, de serpents qu’il attrape pour les attractions locales. Rambo s’est coupé d’un monde dont il ne veut plus entendre parler. Un jour, des missionnaires viennent lui demander de les emmener en Birmanie, l’actuel Myanmar. Connaissant les horreurs s’y passant, Rambo refuse. Mais Sarah, l’une des volontaires, arrive à le convaincre en mettant en avant leur mission. Quelques semaines plus tard, Rambo apprend qu’ils ont été faits prisonniers par l’armée régulière. Parce que Sarah a été la seule à comprendre le désespoir et la désillusion qui l’habitent, Rambo va accompagner un groupe de mercenaires partis à leur recherche. Et seul, il décidera de reprendre les armes pour les sauver.
On craignait le film de guerre propagandiste, avec le retour du super soldat. Mais après « Rocky Balboa », on savait que Stallone ne pourrait revenir avec un remake de « Rambo 2 ». Non, le film que vous verrez (et il faut le voir !) est le plus violent des quatre, en même temps qu’il est le meilleur avec le premier. Stallone s’est réapproprié le personnage, y a mis toutes ses convictions et ses désillusions, pour humaniser le personnage, le rendre plus réaliste et lucide. Le John Rambo actuel est un être perdu, qui ne croit plus en rien, ni en un Dieu quelconque, ni en l’homme qu’il sait être le pire animal vivant. Là-dessus, il le projette dans une ultime mission où sont évités avec tact tous les clichés du genre : les mercenaires ne sont pas invincibles, les pacifistes ne se transforment pas en guerriers d’élite. Le regard porté sur la dictature birmane pourrait être celui porté sur d’autres, et la violence pointée du doigt n’est jamais complaisante, mais simplement celle de la réalité. Quand les balles de mitrailleuses lourdes tuent, elles font de la charpie des corps humains, on n’est plus dans la violence « propre » d’un « Rambo 2 ». Ici, Stallone dit juste qu’il faut regarder en face la vérité : une balle qui transperce un blindage, ne tue pas, elle massacre. Sous son œil, la caméra va donc figer des moments de cruauté, d’abominations que seul les pires de s hommes sont capables de faire. Et Stallone de démontrer une fois de plus l’étendue de son talent de cinéaste, véritable orfèvre d’un film d’action violent car réaliste. Enfin, il se réapproprie donc son personnage, celui qu’il créa à l’écran, qui lui apporta gloire et fortune et l’amorce de son déclin, celui qu’il singea même dans un de ses films (« Tango & Cash » où il dit que « Rambo, c’est une lopette ! »), pour le remettre d’aplomb, tel qu’on le découvrit dans le tout premier film, modèle de survival cinématographique (et chef-d’œuvre dans la carrière du cinéaste Ted Kotcheff au passage). Quelques images des deux autres opus pour ne pas les oublier dans la vie de Rambo, le retour du thème musical de Jerry Goldsmith, et un long plan final pour boucler cette boucle, directement en liaison avec le début du premier film de la tétralogie. Intelligent, « John Rambo » ? Oui, les applaudissements en fin de projection le prouvèrent : plus pour la réussite d’un pari impossible que pour la qualité d’un film d’action bien maîtrisé. Plus pour Sylvester Stallone, définitivement une des icônes du genre, mais aujourd’hui, grand monsieur du cinéma. Chapeau bas, Mr Stallone, chapeau bas...
St. THIELLEMENT
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