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Avec : Will Smith, Dash Mihok, Salli Richardson, Willow Smith, Alice Braga.
Distribué par Warner Bros.
100 mn.
Sortie le 19 Décembre 2007.
Note : 8/10.
Un peu de nostalgie pour commencer : dans les années 70, à l’époque où la télévision ne passait pas que des séries TV le dimanche, je me souviens avoir vu en fin d’après-midi « Le survivant » de Boris Sagal, seconde adaptation d’un roman de Richard Matheson, « Je suis une légende », où Charlton Heston était un des derniers survivants de l’espèce humaine dans un New-York dévasté et autrement peuplé de mutants albinos coiffés à la mode afro du moment (ben oui !). Dans les scènes marquantes, l’attaque de ces créatures et Charlton Heston qui joue aux échecs avec un androïde, pas très catastrophé de son triste sort. Revoir « Le survivant » aujourd’hui se révèle très difficile (il est ressorti en HD DVD, on se demande bien pourquoi avant de faire le rapprochement avec la nouvelle version... Mais quand même !) tant le film a super mal vieilli, et ne tient pas très bien la route, servi en plus par une réalisation de Boris Sagal, certes doué pour la télévision, mais pour le cinéma, ce n’est pas vraiment le domaine où il excella le plus.
Retour au présent (ça fait du bien aussi !) : après bien des années de d’attente, d’espoir, de bonnes nouvelles, de mise en chantier, d’annulation, de noms rattachés à une nouvelle version du roman comme Arnold Schwarzenegger, Ridley Scott, « Je suis une légende » est remis sur les rails et de façon sérieuse et concrète. Will Smith incarnera le survivant, ça c’est plutôt une assez bonne nouvelle, Francis Lawrence le réalisera, et là, on n’y croit plus : Lawrence, c’est un seul film à ce jour, mémorable, à savoir le très mauvais « Constantine ». Quelques mois plus tard, de premières images tombent, suivies bientôt par une première bande-annonce. L’espoir renaît. Aujourd’hui, à quelques jours de sa sortie en salles, on sait : « Je suis une légende » est une excellente surprise, vu le peu qu’on en attendait, doublée d’un très bon film d’anticipation. Et malgré quelques réserves, on tient là la meilleure adaptation du roman de Matheson.
Aujourd’hui. Un vaccin contre le cancer vient d’être créé avec un taux de réussite proche du cent pour cent. Trois ans plus tard. L’humanité n’existe quasiment plus. Seul humain mystérieusement épargné par un virus provoqué par la dégénérescence du vaccin contre le cancer, le médecin-colonel Robert Neville vit son quotidien diurne dans un New-York mort, redevenant peu à peu sauvage, en compagnie d’un chien, s’étant recréé un mode de vie fait de recherches de nourriture, de visites gratuites dans les librairies et autres lieux de culture, ainsi que sa recherche d’un vaccin endiguant le fléau. Chaque jour, il lance un message radio aux éventuels autres survivants. Neville a tout perdu, même sa famille, décimée sous ses yeux. Pourtant, il persiste à travailler sur un antidote, qu’il expérimente sur les « créatures de la nuit », des « infestés » mutants au vaccin, qui hantent New-York la nuit tombée. Le seul moment de la journée pou Neville se cache, se terre et attend le jour. Son présent est-il irrémédiable ou existe t’il encore un espoir pour sauver notre monde d’une extinction totale et définitive ?
Dans le genre apocalyptique et fin de l’humanité, le chef-d’œuvre est toujours « La guerre des mondes » de Steven Spielberg. Ici, les deux premiers tiers du film sont assez terrifiants. Dans la conclusion de la révélation d’une découverte capitale (le vaccin contre le cancer déviant vers le virus que n’importe quel scientifique redoute de voir naitre un jour, celui qui nous décimera en quelques semaines...), dans la description d’un quotidien cauchemardesque que vit l’unique survivant (pour une cause inconnue, mais ça, ça existe : le grain de sable dans toute maladie ou fléau supposé total), dans sa survie face à des monstres qui avant étaient des humains plus que normaux, dans la description d’un New-York, atomisé par la maladie ayant éradiqué toute vie humaine à une près (le travail des effets spéciaux est ici simplement ahurissant !). A la surprise générale, Francis Lawrence arrive à rester relativement sobre pour nous dépeindre cet avenir apocalyptique, et Will Smith ne nous la joue pas « one Smith show » malgré quelques séquences très posées (il fait sa muscu, par exemple). Non, simplement dans son regard, tout se lit : détermination, solitude, peur, chagrin, etc... La révélation des « infectés » par contre sonne le premier bémol : un look signé Patrick Tatopoulos, un peu déjà vu, servis par des effets numériques qui les décrédibilisent assez (ils se meuvent à une vitesse foudroyante, qui gêne plus que cela ne surprend). Le point intéressant est la lutte qui les oppose à Smith, un peu comme si ils lui reprochaient d’être encore « normal » et que sa mort les soulagerait de vivre cette nouvelle existence de « mutants ». Et c’est alors qu’arrive enfin la rencontre avec une autre survivante, qui annonce à Neville la possibilité d’autres « comme eux », regroupés dans un sanctuaire, tout ça sur fond de message divin. Et là, on grince un peu des dents : les USA et Dieu, ça devient vraiment lourdingue (Dieu est partout : au foot avant un match, dans la police avant de s’engager à la vie à la mort, dans les hautes sphères politiques, etc...). Et même si Smith pique une colère contre Dieu, ce qui en soi est assez surprenant (les ligues religieuses ont quand même boycotté « A la croisée des mondes » là-bas, on croit rêver !), la fin peut être envisagée par certains comme la preuve de « son » existence. Bon, heureusement, le discours n’est pas très appuyé, et on peut y voir aussi la preuve de l’existence de cet autre grain de sable qui empêche la perfection d’exister, les extinctions totales d’aller jusqu’au bout de leurs noirs desseins. Tout cela sur seulement une heure quarante, ce qui suffit amplement à nous recréer un monde apocalyptique créé par l’homme, pour un film rehaussant largement les compétences d’un metteur en scène dont on ne voulait plus entendre parler, pour ce qui constitue à ce jour une des meilleures œuvres d’anticipation, et de terreur, sur le futur de notre monde. C’est surtout sur cette partie là que « je suis une légende » gagne ses galons, le reste étant libre d’opinion selon tout un chacun.
St. THIELLEMENT
Note :
La première adaptation du roman de Richard Matheson "I am Legend" (1955) est le film "Je suis une légende" de S. Salkow et U. Ragona (1964), un excellent petit film joué par le prodigieux Vincent Price, film dont Romero s’est sans doute inspiré pour son "La Nuit des morts-vivants" (ce film de Romero est le fruit de bien des inspirations cinématographiques).
Le film "Le Survivant" de Boris Sagal (1971) est effectivement très lourd et tout le fantastique a été sorti de cette histoire à dormir debout... Je ne sais pas ce qu’en aurait pensé ce pauvre Richard Matheson...
Voir notre dossier "L’Apocalypse selon SF dans le numéro 54 de sfmag.
Alain Pelosato
Un autre avis
Après qu’un nouveau vaccin a été trouvé pour guérir le cancer, quelques années plus tard, les personnes vaccinées développent une pathologie qui les font muter.
Le colonel Robert Neville recherche un antidote, mais avant qu’il ne trouve quoi que ce soit, 90 % de la population mondiale est éradiquée. Les survivants sont pour la grande majorité des infectés qui vont dévorer les autres. Robert Neville se retrouve seul à New York. Accompagné de sa chienne, Sam, il survit en se servant des provisions qu’il trouve dans les appartements délaissés et en tentant de chasser les animaux qui ont pullulé en l’absence de prédateurs de jour.
La nuit, il se barricade dans son appartement pour éviter que les infectés trouvent son repère...
Quelle déception ! Ceux qui ont connu la version de 1971, avec Charlton Heston, ont encore en mémoire cette ambiance si dérangeante - angoissante - qui baignait chaque image. Il était pourtant facile de faire mieux, mais il semblerait que deux choix malheureux ai ôté toute chance de réussite à cette nouvelle adaptation :
– les mutants sont ici réduits à des zombies sans philosophie que leur soif de viande fraîche rend effrayants mais qui sont loin d’avoir cet esprit de revanche, cette condamnation morale qui animaient les précédents survivants des années 1970. De plus, le choix des producteurs de les représenter par le biais d’images de synthèse enlève toute réalité et gomme la menace amenée par l’humanité maudite.
– Will Smith a beaucoup de talents, mais il n’est pas un bon acteur. Lorsqu’on lui demande d’offrir une palette plus large d’émotions, il retombe sans coup férir sur les deux ou trois à son actif. C’est pourquoi, si la première partie tient la route, dès lors qu’il doit exprimer des sentiments plus forts, plus poignants, il nous lâche en route et nous fait perdre tout le bénéfice acquis. Néanmoins, il y a deux très bons comédiens à l’affiche : Alice Braga que l’on voit une dizaine de minutes à la fin et la chienne Samantha, qui est parfaite, émouvante, sensible, opportune, tout ce que n’est pas Will Smith.
Les plus jeunes spectateurs sans référence trouveront sûrement ici un bon film d’action, mais avec la matière du roman de Matheson, les possibilités offertes par les effets spéciaux actuels nous aurions dû assister à un véritable chef d’oeuvre.
Valérie Revelut
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