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Scénario : Matthew Michael Carnahan
Avec : Jamie Foxx, Chris Cooper, Jennifer Garner, Jason Bateman, Jeremy Piven.
Distribué par Paramount Pictures France.
110 mn.
Sortie le 31 Octobre 2007.
Note : 8/10.
Le film au sujet casse-gueule par excellence, comme tous ceux qui touchent au conflit américano-irakien. On le sait maintenant, la guerre d’Irak est devenu pour les Américains leur nouveau Viet-Nâm. Et le pire, c’est qu’ils n’en connaissent pas vraiment le fond. Leur patriotisme balayant tout, ils cherchent seulement maintenant à savoir ce qu’il en est. Et bien entendu, le cinéma ne pouvait rester étranger au sujet. Là où le tout Hollywood est majoritairement (à part quelques cas, comme Dennis Hopper par exemple, alors que même Schwarzenegger prend parfois des positions opposées à celle de son parti, non mais quel bazar !) contre la politique Bush, peu à peu certains films commencent à traiter le sujet dans les grandes lignes de fond, corroborant les reportages de la presse, et allant même parfois plus loin. Ainsi, on verra bientôt « Dans la vallée d’Elah » avec l’implacable constat de cette guerre sur ceux qui croyaient encore à leur pays, « Battle for Haditha » sur la folie des soldats US croyant être au-dessus de tout. Et aujourd’hui, « Le Royaume », où comment tout a commencé, qui sont les bons, qui sont les méchants, et qui est vainqueur, qui est le perdant. Avec Michael Mann derrière le projet, on savait qu’on n’aurait pas un film de guerre pro-Bush avec un Chuck Norris défendant le drapeau. Une des grandes qualités du « Royaume », c’est d’aller bien au-delà de ces simples enjeux.
A Riyad, un énorme attentat cause la mort de cent personnes et en blesse plus du double, au sein de la communauté occidentale. Aux USA, les exécutifs cherchent les solutions diplomatiques. L’agent spécial Ronald Fleury (Jamie Foxx) qui y a perdu un de ses hommes, obtient quelques jours sur place pour mener l’enquête avec son équipe. Mais il se heurte rapidement à l’hostilité des forces policières locales. Il décide alors de traiter d’égal à égal avec un homologue, le colonel Al Ghazi. L’entente va se faire et permettre de découvrir le cœur d’autres attentats à venir et perpétrés pour gagner une guerre qui dure depuis des décades entre le Moyen-Orient et les USA. Une guerre de hauts pouvoirs, une guerre qui risque de ne jamais avoir de fin, une guerre qui ne compte plus ses victimes tant elle fait partie du quotidien.
Au départ, on a du mal à comprendre les enjeux du scénario de Matthew Michael Carnahan (le frère de Joe, celui qui fit « Narc » et « Mise à prix », avant d’attaquer prochainement « White jazz » écrit par son frérot justement). Puis, petit à petit, les pièces du puzzle s’assemblent en même temps que Ronald Fleury commence à comprendre certaines choses. En même temps, deux cultures sont étudiées avec leur travers et leurs qualités, où certaines personnes prennent conscience de mettre en commun leurs qualités professionnelles pour débusquer la vérité. Laquelle sera implacable, tuant de nouveau les innocents, (paradoxalement, bons et mauvais...), et ne servant à mettre à jour qu’un petit engrenage d’une vase machine de puissances diverses où tout se joue dans les hautes sphères de la finance, de la politique, du pouvoir. La fin est de ce fait quelque part surprenante puisqu’il n’y aura ni gagnant, ni perdant, juste des morts et des vivants se rendant compte qu’il faudra vivre avec cette nouvelle donne mondiale. Film de guerre, de politique-fiction, « Le royaume » constitue un choc quasi-parfait tant dans ses idées que dans une mise en scène ambitieuse, confiée à l’acteur Peter Berg (l’amant de « Last seduction », le jeune héros poursuivi par le psychopathe Horace Pinker dans « Shocker ») devenu depuis quelques années réalisateur avec « Very bad things », « Bienvenue dans la jungle » et son excellent « Friday night lights » sur le football au cœur d’une Amérique profonde, et qui fut certainement le déclencheur d’être choisi pour « Le royaume ». En évitant les clichés inévitables (mais bien des gens en voient là où il n’y en a pas, comme d’habitude...), servi par un casting quasi-parfait (le « quasi », c’est pour Jennifer Garner, assez neutre...), et mêlant habilement séquences d’enquête conflictuelle, liée aux deux peuples, et scènes d’action anthologiques (l’attentat du début, la fusillade finale), non seulement Peter Berg démontre un savoir-faire complètement maîtrisé, en plus de signer le premier meilleur film sur cette vaste guerre pétrolière qui nous dépasse tous, nous, simples humains.
St. THIELLEMENT
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