On sait qu’un des thèmes préférés de Serge Brussolo concerne la mutation, la transformation, la modification des corps, des organismes pour une adaptation à un milieu, pour répondre à un besoin, ou par une évolution incontrôlée. Dans ce cadre, l’auteur nous a régalés de milliers de pages, de centaines de situations où son imagination sans bornes laissait libre cours à des processus naturels ou provoqués.
Avec DESTROY, l’auteur revient à ce sujet favori et se « régale » avec les possibilités réelles et supposées des nanotechnologies. On retrouve aussi, dans le premier rôle, Peggy Meetchum, une vieille connaissance que l’on a pu rencontrer dans Les Enfants du Crépuscule, Baignade accompagnée et Iceberg Ltd sous l’orthographe, à l’époque, de Peggy Mitchum.

Pour L’homme de la banquise, elle est devenue une alpiniste chevronnée. Elle est chargée d’aller décrocher et ramener le cadavre d’un riche industriel, pour que sa mort soit officialisée et que les héritiers puissent jouir de sa fortune. Mais il s’est tué dans un endroit inaccessible où règnent des conditions climatiques effroyables. Elle finit par localiser le corps, mais il est prisonnier d’une telle gangue de glace... qu’elle décide de ne revenir qu’avec la tête. C’est au retour qu’elle dévisse. Sa corde de sécurité s’est cassée, à moins qu’elle n’ait été coupée...
Puis, l’auteur nous fait découvrir le parcours de Yumiko, une ex-hôtesse de l’air, devenue sous les ordres d’un ex-colonel du KGB, une tueuse au sein du département Y. Elle est spécialisée dans les missions de type « Hit and Run »
Pour l’heure, elle est chargée de tuer un homme qui s’enfermé depuis cinq ans dans un bunker, « au centre d’un labyrinthe de galeries hérissées de défenses : un paradis pour paranoïaques. » Afin de réussir cet exploit, on lui injecte des nano particules, programmées pour modifier son organisme et le rendre capable de résister aux pires avanies ...pendant trois heures. Après la programmation s’efface. !
Cependant, lorsque la programmation s’efface, certaines nano particules peuvent rester vivaces et s’inventer des missions aberrantes. C’est au retour d’une mission que Yukomo constate une évolution de son organisme et de son épiderme. Elle mute ! Ses employeurs s’inquiètent et veulent la remplacer. Ils ont des vues sur Peggy, qui est grabataire. Comment pourrait-elle refuser de revivre presque « normalement » ? D’autant que les nano particules restent, maintenant, programmées trois mois !

Partant du principe que les choses ont bien changé, que les « espions et les tueurs de papa », n’ont plus leur place face aux panoplies des nouvelles technologies, qu’un individu ne peut être excellent dans tous les domaines, Serge Brussolo adapte ses tueurs. Pour celle-ci, l’auteur utilise les nanotechnologies, des micro-organismes programmés pour accomplir des missions prédéfinies. Il obtient ainsi des individus aux capacités nouvelles ...et presque infinies. Il se lance dans le développement d’une série de péripéties, accumulant les obstacles, augmentant les difficultés, multipliant les impossibilités.... Autour de ses deux héroïnes, il enrichit les situations, les sentiments qu’il sait si bien mettre en scène, les choix impossibles, les avenirs bloqués, la nécessité d’agir malgré tout, la paranoïa, l’angoisse et la terreur...

Bien que très séquentiel, ce premier volume offre du rythme, de l’action et permet de faire connaissance avec les capacités de ces deux femmes.

Un « Brussolo » de haut niveau !

Serge Perraud

DESTROY : T.1 - L’Homme de la banquise, Serge Brussolo, Vauvenargues, mars 2007, 256 pages, 6,99 €