Denis-Pierre Fillipi acquiert, d’album en album, ses lettres de noblesse en tant que scénariste. Depuis 1998, où il a signé avec Tiburse Ogier, Orull, le faiseur de nuages, il n’a cessé d’écrire des textes avec une particularité qui attire l’attention, une singularité dans le sujet retenu ou un traitement novateur de thèmes pourtant classiques.
Avec Marshall, il aborde, dans un grand récit épique, les errances que peut susciter l’usage non contrôlé de produits, les progrès réalisés dans le seul but d’accroître les gains, de satisfaire la soif d’ambition et de pouvoir de quelques individus.

Réminiscences débute lorsque Jiru et Kamida, s’étant introduit dans la zone interdite de Iriu, découvrent grâce aux projections mentales d’un robot, le passé et l’histoire de leur civilisation.
Pendant ce temps, le groupe des autres fugitifs, autour Maître Ayashi et de Hisaya, la belle et dernière Marshall, est sur la piste de Iromato Sakuran, afin de réunir des preuves pour le discréditer auprès du Consortium. Mais les hordes guerrières que celui-ci a créées, sont sur leurs talons.
Jiru et Kamida apprennent que leurs ancêtres avaient isolé l’hormone d’une plante qui donnait, aux individus, l’accès à la totalité de leur capacité mémorielle. (NdR : Les chercheurs s’accordent pour estimer que l’homme d’aujourd’hui en utilise moins de 15 %) Les progrès dans tous les domaines font des bonds considérables jusqu’à ce que les hommes en découvrent le prix à payer...
Dans un laboratoire abandonné, Ayashi et Hisaya découvrent un homme tronc qui dit s’appeler Sakuran, que celui qui les traque est un robot à son image contenant l’esprit de Togeshi, son homme de confiance...

Denis-Pierre Fillipi, qui fait preuve d’une imagination fertile, a conçu un scénario dense, fort bien écrit, avec nombre de rebondissements, de coups de théâtre. Si l’on avance vers des réponses aux nombreuses interrogations soulevées jusqu’ici, des révélations font progresser l’intrigue vers d’autres pistes, vers de nouveaux aspects dans l’univers riche que l’auteur a conçu pour l’évolution de ses Marshall.
Mais le scénariste, s’il donne à l’action et au mouvement une large place, explore des thèmes plus fondamentaux, des approches plus philosophiques comme l’usage de la science, des richesses de la Terre, par rapport à la nature humaine. Il ne craint pas d’aborder des voies nouvelles, s’appuyant sur des mondes futuristes pour mieux pointer du doigt nos dérives actuelles.
Tirso Cons, qui signe seulement Tirso, aborde depuis peu la BD après avoir acquis une forte expérience dans la publicité. Il reprend, avec ce volume, le crayon de Velasco. Et il faut reconnaître qu’il s’en sort très bien. Son trait est assuré, harmonieux. Il soigne les décors, apportant autant de soins aux arrière plans, simplifiés certes, qu’aux avant plans. Du beau travail !

Réminiscences relance l’intérêt pour une série déjà passionnante.

Serge Perraud

Marshall : T.4 - Réminiscences, scénario de Denis-Pierre Filippi, dessins de Tirso, couleurs de Javi Montes assisté de Silvia Villamisar, Les Humanoïdes Associés, février 2007, 56 pages, 12,90 €