L’Australie et sa culture deviennent de plus en plus présentes dans notre paysage et sa représentation ne se borne plus, (Dieu Merci !) à la seule équipe de rugby, aux aborigènes ou aux kangourous. L’Australie exporte sa littérature de l’imaginaire et celle-ci mérite le détour. Mais la SF et surtout la fantasy restaient un peu en retrait. Aussi, que la fantasy australienne débarque, avec Sara Douglass comme figure de proue, est une bonne nouvelle.
La Trilogie d’Axis débute les récits qui s’inscrivent dans l’univers de Tencendor, la plus grande nation du pays d’Achar. Il y a plus de mille ans, des conflits ont ravagé le pays et fait éclater le royaume. Aujourd’hui, trois peuples se partagent les territoires. Une Prophétie annonce la venue du Destructeur et de l’Homme Étoile qui le combattra. Celle-ci semble se réaliser lorsque Gorgrael, et ses hordes de démons, déferlent du nord, saccageant et massacrant tout sur leur passage.
Axis est un guerrier d’élite, un Tranchant d’Acier. Il a commandé les Haches de Guerre, au service de l’Ordre du Sénéchal. Face aux démons des glaces, il a dû se replier. Il s’est réfugié chez son père, à Serre-Pique, auprès des Icarii. Il se révèle être l’Homme Étoile annoncé par la Prophétie. Il est en passe, avec les leçons de Vagabond des Étoiles, son père, et de Étoile du Matin, sa grand-mère, de devenir le plus puissant des Envoûteurs que la terre de Tencendor ait porté. Mais, il n’oublie pas la retraite face aux hordes, ni les manœuvres de Borneheld, son demi-frère qui le hait. Pour vaincre, il doit fédérer les trois peuples et trouver l’Homme Sombre, le dangereux manipulateur qui a formé Gorgrael à user de la Musique Sombre, la source de pouvoir du Destructeur.
La Trilogie d’Axis, publiée entre 1995 et 1996, est la première saga de Sara Douglass. Dans son univers transparaissent trois éléments essentiels. Le premier est la magie, une magie reposant sur les liens tissés avec la nature et sur le psychisme de l’homme. Le second est l’Amour, avec un grand A, et le troisième est une galerie de personnages digne des plus grandes mythologies. Avec ces éléments, elle développe un monde imaginaire d’une grande cohérence, construisant des histoires aux intrigues puissantes, bien que classiques. Les luttes et batailles sont brutales, qu’il s’agisse de celles entre les armées ou de celles entre les êtres pour faire valoir leurs sentiments. Les individus sont animés de passions dévastatrices, voire paroxystiques.
Sara Douglass maîtrise bien les grandes stratégies militaires et Axis les emploie régulièrement dans les combats qu’il doit mener.
De ce dernier, elle fait un héros au destin qui semble fabuleux, possédant des pouvoirs énormes, mais qui se débat entre deux femmes, entre deux amours qu’il pense aussi forts et aussi sincères l’un que l’autre et qu’il tente de concilier. Il finit par voir les choses ainsi : « Il ne réparerait pas les torts causés à Faraday (NdR : une princesse mariée à son demi-frère qui le hait) en chassant Azhure de sa vie. Il les aimait toutes les deux, ... et il les garderait l’une et l’autre. Il faudrait qu’elles acceptent cette situation, voilà tout ! » Mais les deux élues de son cœur ayant le goût de l’exclusivité, il n’est pas question, pour l’instant, d’un ménage à trois.
Cependant, au-delà de la figure classique du triangle, l’auteur va plus loin et, dans son univers, l’amour platonique n’est pas vraiment de mise. Le rapprochement avec la nature, la présence et la fonction magique de celle-ci entraînent le perpétuel renouvellement de la vie et des besoins qu’il génère, allant jusqu’à l’inceste. De plus, elle joue, entre ses personnages, sur une longévité différente. Les Icarii, par exemple, vivent cinq siècles. Ils ont donc le temps de voir évoluer les générations d’humains qui leur sont proches.
Sara Douglass raconte avec verve une histoire mouvementée, riche en péripéties, en passions débordantes, en astuces narratives et en intrigues de toutes natures. Toutes ces composantes concourent à faire des deux premiers tomes de La Trilogie d’Axis un roman épique que l’on dévore avec gloutonnerie.
Serge Perraud
La Trilogie d’Axis : T.2 - Envoûteur, Sara Douglass, Bragelonne, avril 2006, 544 pages,
25 €