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  Sommaire - Livres -  S - Z -  Le cycle de Merlin, Tome 1-La grotte de cristal
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"Le cycle de Merlin, Tome 1-La grotte de cristal"
Mary Stewart

Editeur :
Calmann-Lévy
 

"Le cycle de Merlin, Tome 1-La grotte de cristal"
Mary Stewart



10/10

Enfant bâtard élevé à la cour de son grand-père, Merlin suivra une ligne parallèle à la légende du Roi Arthur et des chevaliers de la table ronde. Précédant le mythe, Merlin l’accompagnera jusqu’à son apogée. C’est un vieil homme, aussi vieux que le monde, qui se met donc à raconter sa propre histoire, sans exagérations ni rationalisme trop étriqué. De l’âge de 6 ans à la révélation de ses pouvoirs magiques dans la grotte de cristal, Merlin connaîtra une enfance caressée par des cieux encore vides du panthéon chrétien. Par bribes, indices, par le dur apprentissage de la vie aussi, Merlin nous raconte le monde d’alors à mesure où il grandit et prend peu à peu conscience de ses pouvoirs immenses sur les hommes et leurs destinées.

Cette trilogie, best seller un peu partout dans le monde, tient son succès d’une écriture minutieuse, progressive, mettant l’accent tant sur les paysages naturels à la stupéfiante beauté que sur l’évolution des personnages. L’auteur, par un verbe très bien rendu par la traduction, nous réitère un temps où les regards édifiaient des héros, des épées et des mots scellaient des pactes et accords. Au fil d’une écriture sans emphase ni onirisme exacerbé, Mary Stewart nous dresse un portrait à la manière de ceux qu’on édifiait dans le passé concernant les hommes illustres. Mais, et c’est là qu’il faut parler de fresque intimiste, son écriture n’est à aucun moment précieuse, redondante ou par trop enflammée par la légende qu’elle est en charge de raconter. Non, l’auteur nous expose une vie simple en ses balbutiements, et une accession à une certaine idée de la divinité qui ne va pas sans malice ou sans logique. Il faut voir comment Merlin, en faisant l’acquisition de ses attributs de " théurge ", n’hésitera pas à faire usage d’ingéniosité, un art des mots et de la suggestion qui justifient encore plus le terme d’enchanteur. Car, tout en se voyant confronté très tôt au chantage politique et à " l’instrumentalisation " de son pouvoir par la père du futur Arthur, Uther, Merlin va peu à peu ériger sa propre légende et gagner une autonomie, une aura. Si les grands hommes et les hommes libres constituent souvent une faune étrange de personnages adeptes de la solitude volontaire, Merlin, lui, par son don d’ubiquité, son empathie totale avec une nature soumise à son regard et à ses gestes, et ce charisme qui en fait un politicien avant l’heure, nous donne le témoignage d’un homme entier et sincère dans toutes ses actions. Profondément humain et infiniment plus qu’un homme, Merlin nous est dépeint par une écriture amoureuse des pays d’alors, ces terres qu’elle décrit avec un grand respect, un amour et une sincérité rarement égalés dans la littérature Arthurienne, sauf peut-être par le très Howardien, Bernard Cornwell et sa saga axée sur Arthur. Moins dur cependant que ce dernier, le monde de Stewart décrit plutôt une genèse du mythe, car une sorte d’angélisme désactivé de ses allégeances chrétiennes semble préluder à cette histoire, même si les ramures humaines en détournent la facture pour en faire du tout politique et une guerre des parties. Beau, sauvage, poétique, sensuel et sincère, ce cycle qu’on eut aimé voir plutôt en France, nous révèle enfin, quelque trente six-ans plus tard, l’une des plus belles contributions au genre, une voix qui dépasse souvent d’ailleurs celle de Bradley, selon certains.

Espérons qu’un jour un éditeur s’intéresse un peu au cycle basé sur les récits primitifs du " Mabinogion ",
" The Children of Llyr " d’Evangeline Walton, qui met en scène un Pryderi qui n’est autre qu’une image plus ancienne et galloise de Perceval. Cette belle trilogie nous contant la vie de Merlin est à ranger sur les rayons des grands moments de ce " romanesque arthurien " qui ne cesse de fasciner des générations de chercheurs et de lecteurs. Un grand merci donc, encore un, aux toutes jeunes éditions Calmann-Lévy et à son directeur de collection, Sébastien Guillot, dont on ne peut que saluer la qualité des choix quand à ces auteurs qui suscitent autant de débats multiples et enfiévrés au sein des lecteurs.......

La grotte de cristal, Le cycle de Merlin Tome 1, Mary Stewart, Calmann-Lévy, traduit de l’anglais par Brigitte Mariot, couverture de Armel Gaulme, 409 pages, 22.50 €.





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