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Le froid se réinstalle et les différentes sociétés humaines se préparent pour faire face à une nouvelle glaciation. La reconstruction des réseaux ferrés s’intensifie.
L’auteur nous invite à partager les avatars des personnages principaux de la série, leur progression dans leurs missions, vers des buts, choisis ou imposés.
Ainsi, il nous implique dans le parcours de Kurty. Celui-ci doit se plier aux injonctions testamentaires de son père et venger, avec l’aide de la Locomotive, la mort de Floa Sadon en tuant les responsables. Ceux-ci vivent grassement en dépouillant la Transeuropéenne du peu qu’il reste.
Songe hésite entre l’intérêt qu’elle a trouvé à son statut de fiancée de Lon Kwantu, bien que « prisonnière » des usages mongols, et sa volonté de retrouver une entière liberté malgré les risques qui y sont attachés. Ann Suba, entourée de Gislake le pilote et Keverny le mécanicien, remet en état de vol le dirigeavion. Elle doit le faire sous le contrôle permanent et pesant de Maljory, le prétendant à la place de Grand Maître des Aiguilleurs et de celui de Lien Rag, réfugié dans les entrailles de l’immense appareil, et dont les motivations sont, pour le moins, obscures.
Louria Finister tente de repérer le virus, cause des dysfonctionnements informatiques au bénéfice d’Altaï et d’en stopper le mode de propagation. Elle reçoit l’aide d’Edgon Kowning, un escroc de haut-vol, mais expert en la matière et doit écarter Hillary Struble pour tenter de comprendre ce que cette dernière a pu détecter.
Des héros fondamentaux comme Yeuse ou Liensun sont absents, ayant atteint un stade d’équilibre dans leur vie. Yeuse partage la sienne avec Reiner et Liensun assure la présidence, contestée cependant, des Kerguelen.
Ultime mirage clôt La Seconde Époque. C’est fini ! Les parcours conjugués ou croisés des uns et des autres laissent un univers cohérent avec, toutefois, une incertitude de taille quant au devenir du Héros des Héros, celui qui, depuis 1980 porte l’intrigue : Lien Rag.
Lorsqu’on arrive au terme du livre, il semble qu’une porte se referme dans notre dos. On se sent démuni. Pour ceux qui, comme moi, ont eu le plaisir de suivre la série depuis le début, comment se dessine l’avenir ? N’y aura-t-il plus ces rendez-vous réguliers pour retrouver les composantes d’un monde-univers si attachant ? Recommencer depuis le début ? Reprendre une lecture plus approfondie, plus attentive à tout ce que cet « Immense Poucet » d’Arnaud a semé sur notre route, de réflexions, d’annotations, de comparaisons, de critiques et d’ouvertures, de suggestions et de solutions... et de belles aventures fantastiques.
Par ailleurs, que signifie ce titre ambigu ? G.-J. Arnaud veut-il nous faire croire à une dernière vision fausse ? Faut-il prendre mirage dans son sens premier, ou bien est-ce une pirouette du romancier ?
Ultime mirage nous permet de mesurer une fois de plus tout le talent de l’auteur, sa maîtrise de conteur, sa capacité et son art de créer des mondes et surtout de les rendre si vivants, si crédibles. Ce magnifique roman nous fait regretter encore plus cette décision. Mais ne faut-il pas croire aux miracles ?
Serge Perraud
Ultime Mirage : Compagnie des Glaces - Nouvelle époque n°24, G.-J. Arnaud, Fleuve Noir, décembre 2005, 288 pages, 6 €