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Avec Naomi Watts, Adrian Brody, Jack Black, Andy Serkis, Jamie Bell
Distribué par UIP.
Sortie le 14 Décembre 2005.
187 mn.
Note : 10/10.
Certainement le film le plus attendu de l’année. Le « blockbuster » qui peut de nouveau marier la réussite artistique au succès le plus énorme comme ce fut le cas avec la trilogie du « Seigneur des Anneaux ». Celui qu’on souhaite voir en se disant que c’est obligatoirement le meilleur film de 2005, titre tenu jusqu’à présent par « La guerre des mondes ». Le film qui ne devait pas décevoir parce qu’il est signé de Peter Jackson qui a toujours dit que le « King Kong » de Cooper, celui de 1933 donc (oubliez la version de John Guillermin, absolument insupportable aujourd’hui !). était la révélation de ce que serait son métier. De tout ça, on attendait « King Kong ». Et il s’avère qu’après sa vision, c’est encore plus, bien plus...
Quand Peter Jackson, ce réalisateur néo-zélandais qui débuta avec une grossière série B sur des aliens qui bouffent notre vomi intitulée « Bad taste » signa après quelques autres œuvres aussi percutantes (« Meet the Feebles » version porno trash du « Muppet show », le gorissime « Brain dead ») l’intimiste et magnifique « Créatures célestes », on se surprit a se demander ce qu’il pourrait faire de mieux. La réponse fut « Fantômes contre fantômes » qui lui ouvrit les portes vers le colossal projet de la trilogie du « Seigneur des anneaux », époustouflante saga magnifiquement recrée sur le grand écran, monstrueux succès (le « Retour du roi » est la seconde plus grosse recette mondiale d’un film après « Titanic » !) couronnée avec 11 Oscars pour le troisième volet ! De là, tout nouveau projet est accueilli à bras ouvert par n’importe quelle major. Et Universal de relancer « King Kong », abandonné pourtant juste avant « Le seigneur des Anneaux ». Le risque étant de voir un Jackson se reposer sur ses lauriers et de se croire surdoué total. Il n’en est rien : le cinéaste n’a nullement perdu de sa puissance créatrice, ni surtout de sa passion qui trouve ici son point d’orgue avec un rêve d’enfant enfin concrétisé : rendre hommage à ce qui décida de sa vie. Le respect est là, à chaque plan, à chaque image. Jackson étant en plus celui qui a le mieux compris l’utilisation des effets digitaux, à savoir un outil extraordinaire quand il est au service d’un véritable créateur, il se lance dans un « King Kong » réactualisé mais parfaitement fidèle à l’original. L’action se situe en 1930, la grande dépression aux USA, le voyage en bateau vers une île inconnue baptisée Skull island, une peuplade primitive terrée dans une citadelle protégée par des murs immenses, une faune locale d’un autre temps, des dinosaures, une héroine blonde offerte à un singe gigantesque, une étrange relation se nouant entre eux, le mythe de la « Belle et la Bête » se greffant à un grandiose récit d’aventures, le retour à New-York, l’évasion de Kong, ses retrouvailles avec la Belle, un combat homérique au sommet de l’Empire State Building, et la tragédie. Tout y est, tout est créé comme on ne l’a jamais vu, les combats des monstres sur Skull Island sont titanesques mais ils ne seraient rien sans des personnages riches, du simple matelot à Kong, en passant par Ann Darrow (Naomi Watts, parfaite) la Belle, Jack Driscoll (Adrian Brody, excellent) qui succombe à son charme, sans oublier le vénal réalisateur Carl Denham (Jack Black, surprenant) et sans oublier l’extraordinaire travail d’Andy Serkis qui interprète Kong comme jamais on n’aurait cru voir une telle prestation un jour. Celui qui fut le Gollum donne de nouveau ici l’étendue d’un talent qui ne sera jamais reconnu comme celui d’un acteur « normal ». Mais c’est grâce à lui, à la passion de Jackson, à son amour pour le septième Art, que « King Kong » atteint une telle perfection, une telle émotion dans une œuvre pourtant servie en grande partie par de la magie (ses effets spéciaux), qu’on ne sera pas surpris de vibrer aux monumentales scènes d’action, d’être émerveillé comme un gamin devant l’aventure de la découverte de Skull island, et surtout, de sourire à la gaucherie d’un gorille géant face à une jeune femme blonde qui lui trouve bien plus d’humanité que dans bien de ses semblables, et enfin de se laisser étreindre par une émotion telle lors de certaines séquences (quand Ann s’endort avec Kong, la patinoire à New-York, l’ultime rencontre au sommet du building) qu’on en oublie tout effet spécial. C’est magnifique, puissant, et plus simplement, Peter Jackson a signé avec son « King Kong » le chef-d’œuvre qui retrouve la vraie magie du cinéma, comme au premier jour d’un rendez-vous avec ce septième Art : un moment rare et inoubliable.
Stéphane THIELLEMENT
Voir également notre dossier "King Kong" dans le numéro 47 de Sfmag vendu en kiosque à partir du 22 décembre 2005...
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