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Sommaire - BD -  Epoxy


"Epoxy" de Van Hamme & Cuvelier


9/10

1966 : lors d’une discussion avec le dessinateur Cuvelier (1) un grand penseur proposa de relater une histoire se déroulant dans la mythologie grecque en se basant sur une constatation pratique : "c’est parfait, ils sont nus tout le temps et cela n’aura pas un côté graveleux". Et c’est à partir de cette pensée existentielle que Jean Vanhamme se lança dans la bande-dessinée ! Alors que Cuvelier illustrait l’album, Van Hamme débutait au poste de rédacteur en chef du magazine Spirou. Quelques temps plus tard Charles Dupuis (le big boss du magazine Spirou) découvre la BD Epoxy et vire aussitôt son nouveau rédacteur en chef ("Nous avons une publication pour la jeunesse !"). Mais qu’est-ce qui avait bien pu traumatiser Charles Dupuis pour virer le futur auteur de XIII, Thorgal et Largo Winch ?
Tout commence par un naufrage lors duquel la jeune et belle Epoxy se voit capturée par l’énigmatique Koltar qui l’envoie dans un monde étrange (Van Hamme a admis de lui-même que le début était un peu lourd).
Epoxy se réveille sur une plage et est aussitôt confrontée à la violence et à la mort. Capturée par les Amazones elle devient l’amante de la reine Hipolyte. Loin de l’aspect paradisiaque de l’île de Wonder-Woman, c’est une peinture crue et sans doute réaliste de cette peuplade mythique. Les adolescentes amazones apprennent joyeusement à tuer des prisonniers mâles désarmés. Quant aux adultes le poste le plus convoité chez elles est celui de garde aux mines d’orichalque où elles peuvent martyriser les esclaves (masculins bien entendu). Mais rappelez vous la légende des Douze Travaux d’Hercule. L’une des taches du fils de Zeus est de s’emparer de la ceinture de la reine des Amazones. Violence et mort refont leur apparition en pleine séance d’amour physique et Epoxy s’enfuit avec Thésée ( je soupçonne Epoxy d’avoir ainsi inspiré la légende d’Antiope).
Puis c’est la rencontre avec les créatures mythologiques (2) et même les divinités. Or comme chez les humains on en trouve d’assez peu recommandables. Chiron, présenté comme le sage des centaures, s’avère être un tyran. Aphrodite la déesse de l’amour est des plus narquoise "ta médiocre beauté ne m’a déjà que trop gaché le jour naissant". Hermès se présente comme le dieu des marchands, des bergers, des orateurs, des errants et des guérisseurs. Mais Van Hamme s’est rappelé qu’il est également le dieu des voleurs (3). Epoxy se retrouve amie (et souvent plus) de certains et ennemie d’autres.
Van Hamme a donné à son héroïne une personnalité complexe. Délaissée par Hermès elle cherche la mort et prend la place de Psyché condamnée par Aphrodite et tombe entre les mains d’un être ailé des plus sinistre "faire souffrir est mon destin", son nom est...Eros (le symbolisme saute aux yeux). Mais elle n’hésite pas à défier Hadès, à tenir tête à Aphrodite et même à envoyer bon nombre de ses ennemis rejoindre leurs ancêtres "ce qui est amusant bande de terreurs, c’est que c’est moi qu’on qualifie de mortelle".
Cet album reflète l’érotisme des années 60 (Priape est représenté de dos), mais révèle également certains aspects de la personnalité de Van Hamme. Sur plusieurs pages consacrées aux Enfers seules quelques cases représentent les Champs-Elysées, par contre il donne une large place au Tartare.
"La fin est trop légère" (dixit Van Hamme), mais mine de rien cela laisse une fin ouverte. Epoxy est t’elle morte ou bien repartie dans le monde de la mythologie ? Peut-elle a t’elle rejoint Thésée, pris le nom d’Antiope et donné naissance à Hippolyte ? Elle contribuerait ainsi à une nouvelle tragédie.

(1) : "L’extraordinaire Odyssée de Corentin Feldoë", "Flamme d’argent", "Line"
(2) : Van Hamme a réutilisé le nom du centaure Fural dans la saga Thorgal
(3) : Il fallait bien que Simon Ovronnaz ait une divinité

Damien Dhondt

Scénario : Jean Van Hamme, Dessin : Paul Cuvelier _ Epoxy _ Edition du terrain vague (1968), Lefrancq (1998), Lombard (2003) _ Réédition, grand format, couleurs, 80p. 11,30 euros




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