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Sommaire - Interviews -  George A. Romero


"George A. Romero" de Stéphane Thiellement


LAND OF THE DEAD
Interview de George A. Romero, réalisateur et scénariste
(Cette interview date de l’été 2005)

Ca y est, Big George (il mesure près de 1m95 !) est de retour. Celui qui nous avait laissé plus que sur notre faim (fin ?) avec l’assez neutre « Bruiser »remet le couvert avec les zombies dans un quatrième opus d’une saga qu’il a créée il y a maintenant 37 ans. Pour lui, rien n’a changé, il est toujours le même, ses zombies évoluent tout en gardant leur attitude d’antan, et ce « Land of the dead », sans être aussi fort que « Day of the dead » fait sacrément plaisir à voir.

Je me souviens avoir vu un reportage sur vous en bonus d’un DVD Collector qui regroupait « Season of the witch » et « The crazies » où vous disiez que vous étiez dans une drôle de période, où on ne vous proposait rien, où vous vous sentiez un peu étranger au cinéma Fantastique, vous qui lui avez pourtant tant donné. Vous espériez faire « Land of the dead » mais rien ne se débouclait. Et soudain, très rapidement, le film est mis en chantier, en plus par une major. Que s’est-il passé ?

C’était vrai, j’ai été dans une sale période, j’écrivais, on me payait mais rien ne se concrétisait au delà. Je n’ai jamais été un « Hollywood guy », j’ai toujours voulu faire ce que j’avais envie, ça m’a porté préjudice. Mes films étaient trop noirs. Et je savais que si je revenais au cinéma, ce serait avec les zombies. Je les ai toujours aimés, et ça m’a réussi. Avant le 9 Septembre, j’avais un script très porté sur les luttes sociales, de classes, tous ces éléments qui rebutaient les exécutifs qui voulaient des choses agréables, parodiques. Après le 9 Septembre, c’était pire. Alors j’ai attendu, j’ai observé l’Amérique d’alors et j’ai eu d’autres idées. Curieusement, cela a intéressé quelques studios dont la Fox. Mais ses dirigeants faisaient trainer les choses. Et puis il y a eu le remake de « Dawn of the dead « (« L’armée des morts ») et « Shaun of the dead » qui ont véritablement cartonné. J’ai rencontré Mark Canton qui a lu mon script, qui l’a aimé au point de dire qu’il pouvait le produire pour Universal et qu’on pouvait tourner dans 15 jours si j’étais d’accord. Je ne le croyais pas. Mais c’est arrivé, et en plus, j’ai vraiment eu carte blanche et surtout on m’a laissé tranquille tout le temps du tournage.

Actuellement, le cinéma américain n’hésite pas à montrer des faits tragiques, sombres, même dans un blockbuster comme « La guerre des mondes » de Spielberg. Dans “Land of the dead ”, vous n’épargnez pas l’administration Bush. Cela ne vous a-t-il pas posé des problèmes ?

Non, aucun. Vous savez, Mark Canton, le producteur, est un farouche opposant à Bush, alors... Seul Dennis Hopper était républicain, et même quand il a pris le rôle, il a tout de suite vu que son personnage était inspiré par Donald Rumsfeld. Mais ça l’a amusé. En même temps, savoir que ce gars-là vote pour Bush... Merde, savoir qu’ « Easy rider » est devenu républicain, c’est dur à avaler ! Mais même ainsi, je n’ai jamais eu de contraintes sur le film à cause de ça. La NPAA (la censure) m’a légèrement embêté sur quelques points de gore, et encore, par rapport à mes précédents films, ce n’est rien. Ce sont les seuls menus soucis que j’ai eu.

Dans la trilogie, mon préféré est « Day of the dead » or, quand on voit « Land of the dead », on pourrait croire que ces deux films ont été faits quasiment en même temps, un peu comme si vous l’aviez écrit en continuité directe avec le troisième volet.

Oui, je comprend, mais si vous regardez bien, il y a dans « Land of the dead » des éléments des autres films, de « Dawn of the dead » surtout avec ces zombies qui reviennent au centre commercial parce que ça leur rappelle quelque chose de leur passé. Big Daddy est quant à lui une version améliorée de Bub, le zombie apprivoisé de « Day of the dead ». Ce qui m’intéressait, c ‘était de développer le comportement des zombies, leur faire retrouver une certaine humanité perdue alors que les hommes dits normaux, eux, versent dans la barbarie et la sauvagerie. Ce que j’ai voulu faire aussi, c’est de créer une sorte de « Chroniques des morts-vivants », où on voit leur évolution...

On a effectivement l’impression que vous les rendez plus humains que les humains...

Non, je montre juste ce que je vois autour de moi. Ce que je voudrais aujourd’hui, et que je ferai peut-être un jour, si je suis toujours vivant aussi, c’est un « Land of the dead 2 » qui montrerait une nouvelle évolution des morts-vivants. C’est ça qui m’intéresse plus que des effets gores. L’aspect social, politique, associé tout de même à un style qui m’est propre et qui ne dénigre pas les effets sanglants. Créer l’histoire de leur société, et de la nôtre suite à cette catastrophe. Cet aspect « chronique » me passionne beaucoup.

Quand on voit vos films, on se rend compte qu’il y a dans votre carrière liée au cinéma fantastique des films n’ayant aucun élément politique, social, comme « Creepshow » et « Monkey shines », qui est au passage un chef-d’œuvre. Cela ne vous a jamais tenté de ne faire qu’un tel film, sans élément fantastique ?

D’abord merci pour « Monkey shines ». Autrement, non, pas nécessairement. Vous savez, seul « Creepshow » peut prétendre à n’être que purement fantastique, mais c’est aussi à la base une création de Stephen King sur laquelle s’est greffée mon style. Par contre, que ce soit « Monkey shines » ou « La part des ténèbres », il y a un élément plus réaliste, plus ancré dans notre quotidien, en l’occurrence montrer le monstre qui se cache au plus profond de nous. C’est pour ça que j’adore « La part des ténèbres » et « Monkey shines », à part sa fin. En plus, le film a tellement été mal distribué que je pense qu’il est méconnu alors qu’il recèle des idées qui interpelleraient encore maintenant bien des gens.

Et aujourd’hui, que pensez-vous du genre, de son évolution, vous qui êtes quand même un des grands noms du Fantastique. Comment trouvez-vous qu’il a évolué ? je pense personnellement, que depuis un an, les films sont meilleurs qu’il y a quelques années...

Oui. Et en même temps... I don’t know, man. Meilleurs, mieux écrits, mieux produits, les effets spéciaux sont meilleurs... Le succès de certains films fantastiques a donné plus de crédibilité au genre, c’est certain. Il n’y a qu’à prendre un gars comme M . Night Shyamalan. « Signes » est selon ma fille le film le plus terrifiant qu’elle n’ai jamais vu. Son premier, « Sixième sens », était très bien fait et a cartonné. Le succès de « Blair witch » aussi. Tout ça concourt à avoir donné de meilleurs atouts au genre pour donner de meilleurs films. Mais au fond, je n’en sais rien...

Propos recueillis et traduits par St. THIELLEMENT

(Une interview carrière par Marc Sessego est disponible dans le N° 45 de Sfmag papier, ainsi que les interviews d’acteurs et des producteurs...
Ce numéro est disponible en téléchargement dans notre rubrique "ouvrages à télécharger"



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