"Atlas des brumes et des ombres"
Patrick Marcel
Editeur :
Gallimard (30 avril 2002)
|
|
"Atlas des brumes et des ombres"
Patrick Marcel
|
+++
Et de trois ! Après avoir publié Passeport pour les étoiles de F. Valéry, Cartographie du merveilleux d’A.-F. Ruaud, la collection Folio SF lance Atlas des brumes et des ombres. La boucle est bouclée : un guide de SF, un autre de fantasy et maintenant “l’essentiel du fantastique” comme le mentionne un bandeau racoleur.
Dans son liminaire, Patrick Marcel évacue rapidement la définition du fantastique et les études des théoriciens tels P.-G. Castex, R. Callois, T. Todorov, L. Vax ou J. Malrieu. En homme pragmatique, il propose “un récit de fiction mettant en jeu des événements surnaturels”. Puis, comme l’usage banal le veut, il poursuit avec un long et passionnant historique du genre allant de l’Antiquité pour s’achever à l’aube du XXIe siècle dans une orientation tournée vers l’horreur et l’épouvante avec le maître du genre, monsieur Stephen King. On aborde enfin, dans une perspective critique, le guide de lecture, dont les deux tiers des titres appartiennent majoritairement au domaine anglo-saxon des trente dernières années. Bon nombre d’études sur la littérature fantastique ne s’aventurent guère au-delà des années 70, Patrick Marcel défriche le terrain en arpenteur de talent et avec érudition.
Le domaine est nébuleux, mouvant à souhait, et constitué un guide de lecture est toujours un exercice périlleux. On peut toujours pinailler pour savoir si tel écrivain appartient globalement ou non au fantastique, à la fantasy, au polar ou à la SF. Laissons ce catalogage aux bibliothécaires.
Il demeure cependant quelques remarques. Il aurait été judicieux de débuter par la définition traditionnelle du fantastique en France pour montrer qu’outre-Manche, l’adjectif fantastic n’a pas la même connotation et prête à confusion. On parle volontiers là-bas de literature of imagination ou de literature of fantastic. Il est vrai que le monde anglo-saxon offre des mots intraduisibles en français, faute d’équivalents dans notre langue, et adoptés tels quels : nonsense, heroic fantasy, metafiction, space opera, fantasy. Car avec la définition que donne P. Marcel, l’Iliade et l’Odyssée, compositions attribuées au dénommé Homère, entrent a posteriori dans la littérature fantastique, et bien d’autres œuvres encore. Une définition plus stricte du fantastique aurait été souhaitable. Un genre ne peut être étudié que dans un double système, celui d’une culture et d’une époque historique précise, et d’en suivre le développement sémantique. Enfermer un mot qui se joue des frontières est vain. Le fantastique n’est pas un genre figé comme le souligne P. Marcel, il se moque des cloisonnements étanches car il est pluriel par essence. Le choix d’un ordre alphabétique des noms d’auteurs reste certes commode (il y a l’index !) mais trop commun. Un classement chronologique et/ou topographique aurait permis de mettre en relief par exemple la sur-représentation ou le vide du genre. Ainsi on note l’absence du fantastique latin ou extrême oriental. Quoi qu’il en soit la vaste enquête qu’est l’Atlas des brumes et des ombres, reste une invitation à la découverte des fantastiques et gageons que chacun y trouvera son bonheur.
Atlas des brumes et des ombres, Patrick Marcel, Gallimard, Folio SF n° 97, 272 p., (index des auteurs et des titres).
A. Marcinkowski
|
|
|