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  Sommaire - Livres -  S - Z -  Ceux de la légion
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"Ceux de la légion"
Jack Williamson

Editeur :
Le Bélial
 

"Ceux de la légion"
Jack Williamson



10/10

John Star, Hal Samdu, Giles Habibula, Jay Kalam, mais aussi Morgan Chane ou Kimbal Kinnison, autant de définitions nominales stigmatisant définitivement le héros de l’espace, l’archétype du Space Opera, qui donneront au final le superbe Han Solo du Star Wars de Lucas. Williamson, Hamilton et Doc Smith peuvent être considérés comme les fondateurs d’un genre à part entière, le genre du Space Opera. Certes, on pourra peut-être maugréer sur la valeur littéraire plus faible de cette trilogie portée au pinacle par la postface de Roland C. Wagner qui, pour peu qu’elle soit juste dans son assimilation à l’esprit des mousquetaires (peut-être pour en pallier la faible qualité par rapport au cycle des "Loups des étoiles" de Hamilton) , ne peut en racheter la fragilité de l’intrigue et la limite du scénario. Mais comme souvent dans ce Space Opera archéologique si cher à Papa, on peut se sentir charmé et même entraîné à la suite de ce groupe de héros au coeur généreux mené par un Giles Habibula haut en couleur, à la limite de la caricature.

Les pistolets à lance protons ont un charme désuets mais préfigurent bien les futurs pisto-lasers de Star Wars. Mais il y a plus dans ces trois romans repris en édition compacte ("La légion de l’espace", "Les cométaires", "Seuls contre la légion") . Il y a cette belle et naïve jubilation qui font les grandes aventures où tout le décorum en carton pâte et morceaux de ferrailles ne sert finalement pas autre chose que la célébration des grandes amitiés et des aventures dont on sort éternellement victorieux. Hamilton ajoutera la vindicte, le pathos de la quête vengeresse, Smith ses vaisseaux longs de plusieurs kilomètres, Flash-Gordon y dénotera l’aristocratisme, les cycles planétaires de Burroughs autour de Mars, de Venus et de la Lune, apporteront le souffle épique des grandes gestes qui établissent de belles correspondances avec les paysages sauvages du Conan de Howard. Quand à Brackett, elle saupoudra le tout de poésie mystique (dont le second volet de Star-Wars lui est en grande partie redevable, une topique néo-religieuse qui sera remplacée dans la seconde trilogie par un scientisme magique, dommage !) , et de cette douce mélancolie sécrétée par des décors magiques évoquant les anciennes civilisations martiennes. Cherryh et Catherine Moore, elles, y apporteront les délices d’éros, ou quand les femmes et les hommes échangent leurs fluides avec des extraterrestres, cette pugnacité colonisatrice qui évoque les peuples du nouveau monde, comme les conquêtes de Christophe Colomb. Il y a dans ces cycles faussement vieillots des invitations aux voyages où, à bord de vaisseaux aussi improbables que Nessie, on refait le monde ou on le sauve, des mondes où les femmes sont souvent en mauvaise posture (mais pas toujours) et en des poses lascives et les hommes héroïques en diable. Simon R. Green saura s’en souvenir quand il engendrera de sa remarquable trilogie chez Atalante, la trilogie d’Owen Traquemort qui est un peu le Space Opera moderne, évolué, picaresque mais passé au crible de notre monde contemporain.

Alors, on pourra choisir de partir à la suite de la légion de l’espace et tenter de sauver la belle Aladoree Anthar qui détient les secrets technologiques pour sauver les mondes humains de l’emprise des terribles Méduses. Pour cela il faudra les affronter sur leur propre terrain, là-bas, vers l’Etoile de Barnard. Autant dire qu’avec cette quête pour "les joyaux de la couronne bis", les intrépides héros généreux de La Légion de l’espace s’en iront vers des péripéties nouvelles et dépaysantes au possible, du moins pour ceux qui auront gardé leur regard attendri d’enfant pour cette SF d’hier et ces aventures de toujours qui font une belle enclave au monde définitivement condamné par le poème de Poe, celui du regret, celui du "Jamais plus". Naïf mais beau, ce livre est de plus rehaussé d’une touchante couverture de Cédric Lecacheur qui n’est pas sans rappeler celles d’un Brantome chez Fleuve noir jadis, voir de certains illustrateurs de l’underground des années 70/80 comme Peter Elson mais aux couleurs moins saturées. Cette couverture, juste pour évoquer cet entre-monde au décorum désuet mais porteur de tant de charme et des souvenirs de ces gosses de jadis qui rêvaient de châteaux, de princesses, de guerriers mais dans un cadre de Science-fiction médiévale, à moins que ce ne soit de simples soldats mais vaillants, croisant dans un navire de l’espace, avec turbines et gouvernail, voguant dans l’encre infinie comme sur les flots bleutés de notre terre. Du très beau travaille pour bibliophiles et amateurs de bons vieux Space Opera.

Ceux de la légions, Jack Williamson, traduit de l’américain par Catherine Grégoire revue par Pierre-Paul Durastanti et Olivier Girard, Couverture de Cédric Lecacheur, Editions Le Bélial, 502 pages, 23 €.





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