TÁR (Id.)
Réalisateur & scénariste : Todd Field

Avec : Cate Blanchett, Noémie Merlant, Nina Hoss, Sophie Kauer, Mark Strong.
Distribué par Universal Pictures International
158 mn - Sortie le 25 Janvier 2023 - Note : 9/10

Il y a des films dont le sujet peut paraitre un poil rébarbatif, et puis on dissèque un peu la chose, on découvre que c’est le nouveau film du gars qui en avait signé deux autres avant loin d’être inintéressants, on creuse le sujet de son dernier et pourquoi pas, et il y a la tête d’affiche, certes tout n’est pas extraordinaire dans sa carrière mais… Mais du coup, on veut voir. Et quand deux heures trente plus tard, après être resté jusqu’au bout du générique tellement l’envoutement avait été puissant, on sort de ce voyage, une chose est sûre et certaine : c’est un grand film et surtout l’actrice principale est simplement extraordinaire.
Lydia Tàr est une cheffe d’orchestre allemande mondialement acclamée pour son énorme talent. A l’aube d’aller présenter à New-York sa biographie combinée à sa direction de l’orchestre philarmonique de Berlin pour lequel elle va enregistrer un des plus célèbres et difficiles concertos qu soient, Tàr voit sa vie privée s’effriter suite à des révélations, des vérités, qui, pour elle, n’étaient rien mais qui pour l’extérieur représentent beaucoup. Et l’équilibre de son existence risque d’en être la première victime.
De Todd Field, on connait surtout son second film, « Little Children », peinture sociale et intime réussie de personnages évoluant dans une banlieue à l’image très sage. Ci, il s’est intéressé au portrait d’une femme chef d’orchestre, qui a réussi à devenir une référence et une icône dans son domaine, une institution à elle-seule. Mais en même temps, de l’extérieur on ne voit que cette « star », et comme quasiment tout le temps, l’intérieur peut-être différent. En l’occurrence, Tàr a un passif, une histoire de vie très compliquée et dure, et inconsciemment – vraiment ? -, elle est plus vénéneuse voir perverse narcissique que l’équivalent de ce qu’elle dégage pour celles et ceux qui ne voient et ne connaissent que la grande cheffe d’orchestre. Tout cela révélé avec dextérité, subtilité, force, implacabilité, pour en faire ressortir tout le négatif. Et c’est là qu’avec un scénario aussi ambitieux, le choix de l’actrice doit être parfait. Et pour Todd Field, Cate Blanchett aurait dit non, il n’y avait pas de « Tàr », et on ne peut qu’acquiescer. Blanchett livre ici une performance absolument subjuguante, d’une force impressionnante, en tout, une parfaite maitrise du contrôle de son personnage juste guidé par l’histoire et la mise en scène d’orfèvre de Field. Alors oui, de prime abord, on peut rester sur le pas de la porte, ce n’est pas une plongée évidente. Mais ce que l’affiche montre, c’est le résumé de ce qui va nous être révélé et la démonstration n’aura jamais été aussi puissante ! Voilà ce qu’est « Tàr », une œuvre rare portée à bout de bras et de doigts par une actrice totalement définitivement acquise et habitée et par son personnage et par l’histoire, un diamant brut de sensations qui finissent de tailler le matériau pour donner un pur joyau.

Stéphane THIELLEMENT

Voir l’interview de Cate Blanchett dans sfmag No 118 en kiosques du 25 janvier 2023 au 25 avril 2023

Et voici la deuxième partie qui rassemble
les deux précédents (125 + 126) et toutes les nouveautés :

https://www.amazon.fr/128-ans-cin%C3%A9ma-fantastique-SF/dp/249427110X