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  Sommaire - Livres -  M - R -  La Vénus anatomique
Voir 103 livres sur le cinéma, romans, études, histoire, sociologie...


"La Vénus anatomique"
Xavier Mauméjean

Editeur :
Mnémos
 

"La Vénus anatomique"
Xavier Mauméjean



10/10

Xavier Mauméjean a le don de surprendre. Ainsi, depuis son premier roman où il traite de façon peu courante, un thème bien classique, il continue d’offrir aux lecteurs une œuvre atypique, peu banale, en dehors des sentiers battus de la littérature populaire, tout en en utilisant et dévoyant les ingrédients. Après deux ouvrages relatant les « Servitude et grandeur » de super héros, il revient avec une histoire dans l’Histoire, une utopie et une uchronie.

Pour cela, il n’hésite pas à exhumer du tombeau quelques personnages célèbres du XVIIIè siècle et à les remettre en selle pour participer à un grand projet tout à fait dans l’esprit de cette époque. Ces personnages se voient contraints, (on ne discute pas les désirs du Roi) de participer à un concours scientifique qui se déroulera à Berlin, dans le royaume de Frédéric II. C’est ainsi que Julien Offroy de la Mettrie, médecin et philosophe, est sorti de Saint Malo, sa ville natale où il vit chichement, pour rejoindre Honoré Fragonard, un jeune anatomiste et le déjà célèbre Vaucanson. Il s’agit, pour le trio, de créer le nouvel Adam. Ni plus, ni moins ! Mais ce projet révulse certains individus qui voient là une injure faite à Dieu. Les héros auront fort à faire, à Paris, puis sur la route de Berlin, entre les mousquetaires noirs qui les traquent, les mousquetaires gris sensés les protéger, la Chambre Ardente, redoutable tribunal d’inquisition et différentes factions au pouvoir, en lutte entre elles. À l’arrivée, ils découvrent une construction sphérique qui envahit Berlin telle une tumeur maligne : le Panopticon. C’est là qu’ils sont logés avec les autres équipes concurrentes. Ils retrouvent l’ineffable Casanova qui utilise, pour concevoir le nouvel homme, ses simples capacités physiques.

Tenter de définir un tel roman revient à se tromper à coup sûr. L’auteur use de la verve d’un Dumas pour une intrigue digne des meilleurs romans de cape et d’épée. Il disserte, surtout dans la seconde partie, avec les théories de l’époque et anime des échanges à la hauteur de ce siècle des Lumières. Comme dans un livre d’histoire, il fait défiler nombre de personnages importants ayant vécu vers 1750. Il adapte une intrigue de thriller à un conte philosophique en privilégiant un ton léger, humoristique, voire ironique avec un gros zeste d’humour noir. Ce roman contient un foisonnement d’idées, d’anecdotes, de faits. C’est le livre d’un érudit sur le XVIIIè siècle qui jongle allègrement avec les codes. On reçoit une foultitude d’informations dont on a du mal à démêler le vrai du faux, à identifier le véritable événement historique de l’événement romanesque inventé par ce diable de Xavier. Les faits, les événements s’accordent si bien que tout parait réel, qu’on se prend à croire à la véracité du récit.

Et paradoxalement, cette avalanche de théories, d’idées, ce brassage d’hommes illustres mis en scène dans une pièce qu’ils n’ont jamais jouée, ne freinent pas l’action. Le suspense est très présent, car tout y concourt : les poursuites, les pièges, les enlèvements, les personnages composites comme le Chevalier d’Éon et dans la seconde partie, les interrogations sur la réussite du projet. Les connaissances médicales et anatomiques de l’auteur sont assez stupéfiantes. Et l’auteur prend, en plus, la forme et la manière de conter en usage à cette époque, pour donner une tonalité et un cachet historique.

Un livre à aborder avec une grande curiosité, l’esprit ouvert, car c’est vraiment du grand art littéraire.

Serge Perraud

La Vénus anatomique, Xavier Mauméjean, Mnémos collection Icares, octobre 2004, 256 pages, 17 €





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