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The exorcist, the beginning
Avec : Stellan Skarsgard, Isabella Scorupco, Ben Cross.
Distribué par Warner Bros.
112 mn.
Sortie le 17 Novembre 2004.
Note : 3/10.
Depuis le temps qu’on en parlait, ça y est, le quatrième opus de L’exorciste vient d’arriver. Mais à quels prix et pour quel résultat... Retour en arrière : le projet Exorciste 4 est lancé, le cinéaste Paul Schrader (qui signa l’excellent remake de La féline) en sera le réalisateur, et Liam Neeson reprend le rôle du père Merrin jeune, puisque l’histoire débute lors de la première confrontation entre le prêtre et le Diable sous une de ses formes. Quelques mois plus tard, Neeson a cédé la place à Stefan Skarsgard, Schrader rend son film, les producteurs (qui voulaient initialement plus un thriller surnaturel sans trop d’effets gores ni chocs) décident alors de retourner des séquences horrifiques plus visuelles. Schrader quittant le navire, ils cherchent un remplaçant qui aime assez les scènes violentes et impressionnantes avec dans son passif au moins un film du genre, et tombent sur Renny Harlin qui rumine dans l’attente de la sortie de son petit dernier, Mindhunters (des profilers sur une île deviennent les cibles d’un jeu à la 10 petits nègres : de ceux qui l’ont vu, c’est consternant !) qui se jette sur la proposition. Mais il va plus loin (comme toujours chez lui !) : il ne veut pas simplement retourner des séquences, il veut carrément refaire un film, en gardant par moments quelques passages de ce que Schrader à fait. De 30 millions de dollars, le budget du film se montera en finalité à près de... 100 millions de dollars. Incroyable ! Et aujourd’hui, les producteurs annoncent que le DVD comportera les deux films, histoire de rentabiliser un peu plus cet hybride cinématographique.
Maintenant, que vaut L’exorciste, au commencement ? Celui de Schrader, on ne sait pas. Par contre, celui de Harlin, hé bien... C’est du pur Renny Harlin, violent, sadique, énorme, un catalogue d’images et de séquences chocs, dont quelques unes vraiment impressionnantes (une attaque de hyènes démoniaques contre un enfant constituant la meilleure, d’une rare sauvagerie) mais dont l’ensemble ne forme jamais un film. Comprenez par là que le scénario ne tient que sur quelques lignes, le film « l’étoffant » par l’ajout de petites ramifications sans lien logique mais au résultat se voulant terrifiant. Donc, à la base, tout commence par l’envoi de Joseph Merrin, qui a laissé tomber la soutane suite aux atrocités perpétrées par les nazis et dont il fut témoin et acteur durant la seconde guerre mondiale, en Afrique sur un chantier archéologique qui vient de mettre à jour une église byzantine. Sur place, des faits étranges laissent à penser que cette découverte a délivré en même temps un ancien démon, voir peut-être même Lucifer, l’ange déchu. Par la force des évènements de plus en plus mortels, Merrin va accepter l’inconcevable, reprendre sa foi perdue et défier le Mal.
Bon, déjà, l’exorcisme à notre époque avec les possessions diaboliques qui se manifestent par des apparitions et autres visions cauchemardesques, difficile d’y croire. En plus, si on regarde bien les 3 films précédents, on garde le premier pour son statut de classique mais le plus efficace demeure L’exorciste III, celui que réalisa l’auteur du roman original, William Peter Blatty, car il se basait aussi sur la psychologie et la folie. Difficile à partir de là de savoir où est le réel de l’irréel, la folie de la possession. Maintenant, comme on l’a énoncé précédemment, Harlin opte d’office pour le visuel horrifique, choc. Pourquoi pas, mais tous ses effets sont souvent annihilés par l’inintérêt du scénario. Au diable ( !) la logique, ce qui l’intéresse, c’est de montrer qu’il peut faire plus fort que d’autres. Malheureusement, ce qu’il nous montre sort du catalogue du film d’épouvante et d’horreur, et on est rarement surpris par ce qu’on voit, au point qu’on en prévoit presque la scène qui va suivre. L’ensemble n’est pas du tout homogène, ni même lié autour d’un fil conducteur amenant au final apocalyptique qu’on était en droit d’attendre. Et quand en plus arrive cette révélation finale, elle désamorce beaucoup de ce qui s’est passé antérieurement. Déjà qu’on trouvait qu’il ne se passait pas grand chose de palpitant, la conclusion n’arrange donc pas les choses. L’exorciste, au commencement est donc un ratage assez monumental, pourtant pas complètement nul. Car malgré toutes ses faiblesses, ses inepties, ses consternations, Harlin ne livre pas ici un mauvais travail. Techniquement, c’est paradoxalement lui qui évite au film de sombrer dans les tréfonds de la nullité, un creuset que n’ont pas évité Catwoman ou Anacondas cette année, pour citer les pires exemples. Maintenant, attendons la sortie du DVD en espérant comme annoncé qu’on y découvrira aussi la version de Schrader, sans se faire cependant beaucoup d’illusions. Simple pressentiment.
Stéphane Thiellement
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