Cette nuit fut horrible. Les bêtes se concentrèrent sur la porte. Batis tirait sans relâche à moitié dans l’obscurité, il ne suffisait pas à la tâche et me demanda de descendre pour renforcer l’entrée.
Le navire vient d’accoster un îlot perdu dans l’Atlantique Sud. Seuls deux bâtiments y sont présents. La maison du météorologue chargé d’établir des relevés et le phare. Du météorologue les hommes débarqués n’en trouvent aucune trace. Quant au gardien du phare cet être taciturne considère que les visiteurs ne sont que des importuns qui repartiront bientôt. En fait, le navire vient de débarquer le remplaçant du météorologue.
Le nouveau venu, un Irlandais déçu par la conclusion de la guerre d’indépendance de l’Irlande (1919) et sans doute de la guerre civile irlandaise qui a suivi (1922), a choisi volontairement cet exil. Quelles sont les motivations du gardien du phare ? Le dénommé Batis Caffo ne communique guère une fois le navire parti. Il semble se préparer. À quoi ? À l’attaque ! Surgissant de la mer des créatures humanoïdes attaquent une fois la nuit tombée. Utilisant le feu pour repousser une attaque le météorologue provoque l’incendie de son habitation.
Dès lors, il doit cohabiter avec Caffo. Celui-ci a accepté sa présence dans le phare en échange de munitions. Les deux hommes vont presque chaque nuit devoir repousser un assaut. Mais il s’avère qu’ils sont trois dans le phare ! Caffo a réduit à l’esclavage celle qu’il appelle la « mascotte ». Cette créature amphibie du même peuple que les assaillants perturbe la cohésion entre les deux hommes (elle est féminine).
Le romancier nous relate un affrontement qui n’aurait jamais dû avoir lieu entre des hommes et une race qui s’apparente à l’humanité. Le thème du monstre est développé d’une manière originale. Pour chacun des deux camps l’autre peut être considéré comme un monstre. De plus, Caffo s’apparente à un monstre humain. Alors que le nouveau venu sur l’île s’efforce de survivre, les motivations de Caffo sont celles d’un combattant qui ne peut plus se passer de la guerre.
Damien Dhondt
Auteur : Albert Sanchez Pinol, Illustration : Leonor Carcan _ La Peau froide _ « La pell Freda », Traduction : Marianne Millon _ Edition Actes Sud, collection Babel _ avril 2007 _ Réédition, poche, 260 pages _ 7,70 euros
Voir la chronique du film "Codl Skinfilm" dont est tiré ce roman :
http://www.sfmag.net/spip.php?article14110