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  Sommaire - Dossiers -  Filmographie de la Faim (cannibale)

"Filmographie de la Faim (cannibale)"

Pizzoferrato Fred

L’anthologie des Cannibales

EN DVD chez NEO PUBLISHING

Depuis environ six mois, Néo-Publishing sort en DVD zone 2, les principaux films de la vague "cannibale" italienne des années 70 et 80. Quoique de qualité variable, ces productions fauchées nous rappellent la grande époque du gore et permettent de faire le point sur une mode typiquement italienne. En effet, on connaît la propension des réalisateurs italiens à plagier leurs homologues ricains plus fortunés au travers de séries B lorgnant tour à tour vers Dernière Maison sur la gauche de Wes Craven (La Maison au fond du parc ou La Bête tue de sang froid), L’Exorciste de Friedkin (L’anté-christ, Le Démon aux tripes, Return of the Exorcist), Mad Max de George Miller (Les Guerriers du Bronx, New York ne répond plus, Texas Gladiators), Conan de John Milius (Les Barbarians, Conquest), Hitcher de Robert Harmon (La Proie de l’Auto-stop, Hitcher In The Dark), Alien de Ridley Scott (Contamination, Le Monstre attaque !), sans oublier les innonbrables décalques de Amityville ou Jaws. Pourtant il existe un sous-genre qui est typique de la Péninsule et c’est précisément le film de cannibales. On comprend aisément pourquoi, tant ce type de production peut rebuter le spectateur normalement constitué. Mais, malgré leurs excès - ou grâce à eux diront les plus pervers - ces séries B ont acquis un statut de films cultes auprès des amateurs. On retrouve donc, chaque fois, un schéma connu : une aventurière sexy (ou parfois une femme enlevée ou un homme seul) se retrouve piégée dans "l’enfer vert", aux mains d’une tribu de primitifs qui lui font subir les pires outrages. Après de nombreuses scènes de tueries d’animaux (non simulées, bien sûr) et quelques dépeçages dans les règles, la jeune femme assiste à divers rites érotico-gore. D’abord écoeurée, elle finit souvent par accepter ces cruelles coutumes et conclut, invariablement, que "le vrai sauvage c’est l’homme blanc". Tous ces films, sans exceptions, se conforment en fait au schéma général du classique du western qu’est Un Homme nommé cheval (A Man Called Horse, 1970) . Remplacez les Indiens par des cannibales, ajoutez une pincée de sexe et une large dose de gore au chef d’œuvre de Elliot Silverstein et vous obtenez, au choix, le Dernier Monde Cannibale, Cannibalis ou Amazonia l’esclave blonde. Retour sur une filmographie de tous les excès

AMAZONIA - L’ESCLAVE BLONDE *

Sciave bianche / Violence In Amazonia

Réalisé par Mario Gariazzo (1986)

Un film de jungle typique qui surfe paresseusement sur la vague des cannibales lancé peu avant par Ruggero Deodato et Umberto Lenzi. Inspiré d’une histoire vraie, cet Amazonia rappelle également le classique western Un Homme nommé Cheval ainsi que le Cannibalis / Deep River Savage de Deodato.

Ici, c’est une blonde plutôt jolie qui est capturée par une tribu d’indigènes amazoniens après le meurtre de ses parents. Evidemment, un fier guerrier tombe amoureux d’elle mais la demoiselle se refuse à lui, écoeuré par les coutumes barbares des primitifs.

Scénario classique, mise en scène sans génie, et interprétation médiocre sont autant de bémol à cette série B assez banale. Quelques scènes gore et un soupçon d’érotisme (l’héroïne est complètement nue durant les trois quart du métrage) nous rappelent pourtant le coté éminenement gratuit et complaisant des réalisateurs de cinéma bis italien. Ces ingrédients viennent heureusement pimenter un plat plutôt fade qui comprend aussi, évidemment, les tueries d’animaux non simulées typiques du genre.

Au final, l’amateur de série B pourra passer un agréable moment mais le film ne restera surement pas dans les mémoires et on lui préférera sans hésiter les véritables classiques du genre que sont Cannibal Holocaust de Deodato et Cannibal Ferox de Lenzi.

LE DERNIER MONDE CANNIBALE **

The Last cannibal world / L’Ultimo Mondo Cannibale
Réalisé par Ruggero Deodato, 1976.

Voici le grand ancêtre du film de cannibales. Comme dans toutes les productions italiennes analogues, une série de personnes partent en Amazonie pour étudier les indigènes et lancer de grandes tirades, style « le plus sauvage n’est pas le cannibale, mais l’homme blanc qui détruit sa culture » ou encore « les cannibales n’existent pas ». Ce qui est faux d’ailleurs, sinon on ne s’amuserait pas autant dans les gore ritals. Très vite, le petit groupe est massacré et l’unique survivant enfermé dans une cage. Les cannibales le maintiennent en vie, lui balancent des pierres, se foutent de sa gueule et lui pissent dessus dans la grande tradition du genre. Notre héros finit pourtant par s’enfuir en compagnie d’une jeune sauvage et nous offre une torride scène de sexe anal en pleine jungle. Poursuivi par les cannibales, il devra défendre chèrement sa peau.

Ce film a inauguré la juteuse vague "cannibale", entre film d’aventure, gore, romance, érotisme primitif et documentaire ethnologique. Sans les outrances ultérieures, Last cannibal world propose néanmoins son lot d’atrocités, de violences, de nudités et de tueries d’animaux non simulées ; le tout sur un scénario largement pompé - comme toujours - sur le fameux western A Man Called Horse.

Pour fans curieux uniquement ; les autres se replongeront sur les véritables standards tels le monstrueusement gore Cannibal Ferox de Lenzi ou le célèbre et insurpassable Cannibal Holocaust du même Deodato.

Cannibal Ferox **
Make them die slowly

Réalisé par Umberto Lenzi, 1981.

Ce film constitue le pinacle d’un sous-genre popularisé par les Italiens : à savoir, le film d’aventure très gore situé chez les cannibales. Reprenant les grandes lignes du classique Cannibal Holocaust de Ruggero Deodatto, tourné quelques temps plus tôt, notre ami Umberto Lenzi (du moins il aurait pu l’être !) présente une jeune femme partie en Amazonie pour écrire une thèse sur les cannibales. Car, dans ce genre de films, on trouve toujours une belle demoiselle, souvent aussi crédible en ethnologue que Tracy Lord en bonne sœur, prête à aller faire la conne dans la jungle au lieu de fréquenter sagement la bibliothèque de son université.

Evidemment, la jeune femme, Gloria pour la nommer, part avec son frère et, bien sûr, ils tombent en panne d’essence mais décident, forcément, de s’enfoncer dans la jungle au lieu de rebrousser chemin. Logique, n’est-ce pas ? Ils croisent alors le chemin d’une espèce d’aventurier taré, sadique, dealer de came et violeur occasionnel ; ce qui est quand même beaucoup pour un seul homme. Ce personnage peu fréquentable cherche des émeraudes mais, ne les ayant pas trouvées, a torturé quelques femmes indigènes d’un village perdu, profitant lâchement de l’absence des guerriers mâles. Or, les cannibales reviennent et se payent une sévère revanche, dans la grande tradition du gore italien, avec cette scène incroyable au cours de laquelle ils coupent la zigounette du dealer avant de la manger avec délectation. La copine du trafiquant subira un sort guère plus enviable puisqu’elle finira pendue par les seins (!) à des crochets de boucher qui lui déchirent les chairs ! Le frère de l’héroïne, aura, lui, le crâne ouvert pour que les indigènes puissent lui dévorer le cerveau dans une grande démonstration des recettes culinaires amazoniennes - une scène manifestement inspirée par le segment le plus fameux - quoique truqué - de l’anthologie snuff Faces Of Death.

Gloria sera finalement sauvée par un flic qui passait par là afin de coincer le dealer précédemment castré, ce qui prouve à nouveau l’incroyable illogisme du film : les flics américains, bien sûr, coursent les criminels jusqu’en Amazonie.

Tout ça est pourtant extrêmement entraînant, avec une histoire parallèle de trafic de drogue totalement inutile et stupide, une morale édifiante coutumière (« le vrai sauvage c’est l’homme blanc »), un racisme affiché et des scènes gore à n’en plus finir. Le réalisateur sacrifie également à la mode des massacres d’animaux exécutés sans trucage, par pur sadisme, afin de choquer à tout prix un spectateur dont l’estomac est soumis à rude épreuve durant une heure et demie. L’ensemble devrait donc satisfaire les amateurs les plus exigeants de boucherie gratinée.

Tous ses films sont sortis chez Neo-Publishing à petit prix (moins de quinze euros dans toutes les bonnes boucheries - pardon, librairies !) dans des éditions de bonnes factures, en version - intégrales ! - originales sous-titrée ou doublées.

Mais nous ne pouvions conclure ce court dossier sans évoquer le chef d’œuvre du genre, Cannibal Holocaust, disponible lui chez Opening dans une édition collector double DVD bourrée de bonus.

Cannibal Holocaust ***

Holocausto Canibal,

de Ruggero Deodato, 1980
Une série B italienne, réalisée par le spécialiste Ruggero Deodato, plus ou moins vendue en tant que snuff-movie en insistant sur l’aspect amateur de l’ensemble ! Voilà un film qui semble bien roublard, proposant de nombreuses images horribles mais dénonçant simultanément le voyeurisme du spectateur. Deodato veut apparemment provoquer le débat : "faut-il montrer l’enfer pour permettre aux gens de savourer leur bonheur ?" nous demande t’il par l’entremise de son héros. La question clôture le film sur trois points de suspension qui appellent presque à la discussion, dans le style des regretés Ecran Témoin ou Dossiers de l’Ecran. Presque, car la démarche est trop ouvertement calculée pour que l’on soit dupe des véritables intentions du réalisateur.

Cannibal Holocaust appartient aux fameuses vidéo-nasties, sévèrement interdites dans de nombreux pays et, à ce titre, paraîtra peut-être un peu décevant aux spectateurs d’aujourd’hui. La boucherie y est, finalement, moins permanente qu’on pourrait le croire !

Néanmoins, le film accumule quelques scènes bien cruelles, en particulier plusieurs mises à mort d’animaux non simulées et des viols aussi sadiques que complaisants. Les indigènes, eux, sont dépeints comme des êtres sanguinaires et le réalisateur s’attarde longuement sur une scène de torture sexuelle locale ainsi que sur un accouchement loin d’être sans douleur.

Un peu douteux idéologiquement parlant, mais ne chipotons pas.

Enfin, lors des dix dernières minutes, les cannibales se livrent enfin à l’holocauste promis par le titre : castration et démembrement d’un des aventuriers ensuite éviscéré et dévoré ; viol collectif et barbare d’une jeune reporter finalement décapitée, etc. Ces scènes, assez sévères, interviennent après quelques intermèdes érotiques en nu intégral destinés, probablement, à adoucir l’ensemble. La faune locale fournit aussi matière à quelques plans frissonnants (serpent dans une chaussure, araignée sur la poitrine, crocodiles menaçants). Le guide de l’expédition périt d’ailleurs d’une morsure de serpent, malgré un traitement radicla : une amputation de la jambe à coups de machette.

Bref, Cannibal Holocaust n’est sans doute pas un grand film mais il demeure quelque chose qu’il faut avoir vu, ne serait-ce que pour pouvoir parler du gore à l’italienne. Pas vraiment bon mais indéniablement culte, le film inspira visiblement la campagne publicitaire du médiocre Projet Blair Witch !

Après ce tour d’horizon du genre, souhaitons que Neo Publihing continue de nous régaler avec d’autres titres car il existe encore quelques petites perles à (re) découvrir, citons par exemple :

  Pulsions Cannibales (Apocalyspe Domani) de Antonio Margheriti.
  La Montagne du Dieu Cannibale (Slave of the Cannibal God) de Sergio Martino
  Amazonia (Cut & Run) de Ruggero Deodato
  Virus Cannibale (Inferno dei morti viventi) de Bruno Mattéi.
  Antropophageous (id.) de Joe d’Amato
  La Secte des Cannibales / Eaten Alive By The Cannibals (Mangiati Vivi !) de Umberto Lenzi
  Il Cannibal (id) de Franco Prosperi

Note : A l’heure de la rédaction de cet article, Néo-Publishing vient de sortir Cannibalis (Deep River Savage) de Umberto Lenzi, que je n’ai malheureusement pas encore pu visionner.

Pizzoferrato Fred


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