Il se sentit assailli par une poignante mélancolie, quelque chose comme le mal du pays. Ce fidèle symbole de la transmission du courrier, l’écusson brodé de rayures et d’étoiles...Tout cela lui rappelait le confort, l’innocence, la coopération, une simplicité de l’existence qui permettait à des millions d’hommes et de femmes de vivre dans la sérénité, de sourire ou de râler selon leur humour, d’être tolérants les uns envers les autres. Et d’espérer devenir meilleurs au fil du temps.

Dans une Amérique ravagée par un conflit nucléaire et les épidémies, Gordon Krantz erre depuis 13 ans à la recherche d’un lieu où les hommes voudraient rebâtir une civilisation. Les circonstances vont l’amener à revêtir l’uniforme d’un facteur décédé. De cet acte rendu nécessaire par le froid va découler une suite d’évènements aboutissant à une grande saga : la reconstruction des Etats-Unis. En effet, arrivant dans une petite communauté, il constate que son uniforme lui confère un statut symbolique, celui d’un porteur de messages, souvenir d’un pays disparu, aussi les habitants lui confient-ils des lettres pour une autre communauté isolée depuis des années. Cela aurait pu être un simple service rendu, mais voici qu’on lui vole ses maigres biens, aussi il prend la mouche et entreprend l’escroquerie du siècle : se faire passer pour un authentique facteur, émissaire d’un nouveau et lointain centre de décision des Etats-Unis Restaurés d’Amérique. Cette démarche tout d’abord égoïste va devenir une tentative pour recréer une organisation civilisée. Mais sur son chemin se dressent les Survivalistes. Ces nouveaux barbares organisés se prononcent eux pour la loi du plus fort.
Indépendant du cycle de l’Elevation", ce roman (1) datant de 1985 nous permet de découvir une Amérique post-cataclysmique où le rêve américain ne demande qu’à renaître, même s’il faut pour cela avoir recours aux symboles et à la supercherie. La marque de Brin dans la science-fiction réapparaît avec les manipulations génétiques typiques de "l’Elévation" et le combat titanesque et symbolique à la fin.
Dans son adaptation cinématographique Kevin Costner a choisi de supprimer les éléments de science-fiction. Ce roman permet aux lecteurs de découvrir la première version du Postman.

(1) prix John Wood Campbell & Prix Locus (1986)

Damien Dhondt

David Brin _ Le Facteur _ The Postman _ Traduction gérard Lebec _ J’ai Lu,collection Cinéma n° 2261 _ janvier 1998 _ Réédition, poche, 443 pages