SF Mag
     
Directeur : Alain Pelosato
Sommaires des anciens Nos
  
       ABONNEMENT
Sfmag No122
118

11
F
é
v
RETOUR à L'ACCUEIL
BD   CINÉ   COUV.   DOSSIERS   DVD   E-BOOKS  
HORS SERIES    INTERVIEWS   JEUX   LIVRES  
NOUVELLES   TV   Zbis   sfm   CINÉ-VIDÉOS
Encyclopédie de l'Imaginaire, 18 000 articles
  Sommaire - Films -  M - R -  Morse (Let the Right One In)
Voir 103 livres sur le cinéma, romans, études, histoire, sociologie...

"Morse (Let the Right One In) " de Tomas Alfredson

Scénario : John Ajvide Lindqvist
Avec : Käre Hedebrant, Lina Leandersson, Per Ragnar, Henrik Dahl.
Distribué par Chrysalis Films.
114 mn.
Sortie le 4 Février 2009.

Note : 10/10.

Grand Prix & Prix de la Critique du 16ème Festival du Film Fantastique de Gerardmer 2009

Bon, commençons par ce qui fâche : le titre français est débile, l’affiche est hideuse. La communication veut jouer sur quelque chose de « sérieux et intelligent, voir différent », le public en voyant ça et un générique scandinave (suédois exactement) risque de se détourner du film en se souvenant de douloureuses expériences (« Norway of life » par exemple...). Si ça marche, tant mieux. Voilà c’est dit. Maintenant on passe à toutes les qualités du film...

Grand vainqueur de l’édition 2009 de Gerardmer où cette l’année, c’est la Scandinavie qui fut très présente au travers de plusieurs films (dont les excellents slashers « Cold prey », surtout le premier volet, impressionnant !), « Morse » est une œuvre stupéfiante. Dans la beauté, dans son traitement, dans son histoire, dans son originalité, dans son fantastique. Tiré d’un best-seller écrit par le scénariste du film (au moins, il ne reprochera pas d’être trahi par quelqu’un !) publié dans plus de quinze pays (sauf le nôtre), « Morse » (dont le titre original « Let the right one in » n’est guère aisé à comprendre certes, en gros il signifie « Oublier la normalité » mais au moins, même mystérieux, il ne méritait pas une traduction si pourrie !) est déjà en cours de traitement pour un remake US qui serait signé Matt Reeves, connu pour son « Cloverfield »... Passons. Et un film fantastique comme celui-ci, on n’en voit peu, c’est un diamant dans la morosité de l’inspiration actuelle (à Gerardmer, son seul vrai concurrent fut l’excellent « Midnight meat train », tiré de la nouvelle de Clive Barker, d’un style radicalement différent et un million de fois plus sanglant, comme quoi les extrêmes peuvent se compléter !), c’est le bonheur de voir un parfait mélange d’émotion et de violence, de poésie et de peur. C’est certain que tout ça, ça ne se devine pas avec un titre et une affiche aussi ternes.
En Suède, en 1982, l’hiver fut un des plus rudes jamais subis par le pays. Dans son école, Oskar est brimé par un petit groupe d’élèves. Il vit seul avec sa mère, s’invente des jeux où il gagne contre ses ennemis dans la cour enneigée de son immeuble. Un jour, une fille Eli vient habiter dans l’appartement d’à côté. Et elle le retrouve dans la cour. Pour une fois, Oskar échange quelque chose avec un autre enfant. Mais Eli est étrange, elle ne craint pas le froid en sortant seulement vêtue d’un t-shirt, elle ne souhaite pas que sa relation avec Oskar aille trop loin, et en plus, depuis son arrivée, un tueur tue violemment des personnes isolées. Mais l’amitié entre Oskar et Eli va finir par prendre le dessus même quand le petit garçon découvrira qui est vraiment sa première et seule véritable amie...
Comment faire du neuf avec du vieux ? Simplement en prenant une histoire émouvante entre deux enfants marginaux (les deux gamins sont extraordinaires), en rentrant dans leurs secrets, leurs peurs, leurs peines, leurs jeux d’enfants à la fois drôles et parfois si cruels (quand Oskar « joue » à faire rentrer Eli chez lui par exemple...) et en y insérant la mythologie d’un thème, en la traitant le plus sérieusement du monde, sans s’en moquer, et en nous y faisant croire. On passera sur les petits détails qui polluent un peu le film (certains personnages parallèles, victimes en puissance mais dont leur quotidien n’a guère d’intérêt) car dans l’ensemble, le reste est tellement subtil et intelligent et si parfait que cela n’a guère d’importance. Bien sûr, la nationalité du film risque de rebuter. Ce serait un tort car au même titre que l’Espagne il y a quelques années, la Scandinavie se découvre un cinéma loin de celui d’Ingmar Bergman, un cinéma de genre plus que maîtrisé, pas du tout américanisé mais avec un style bien personnel tout en étant conscient du modernisme à apporter pour se démarquer d’un passé peu enclin à susciter un grand intérêt. « Morse » est bel et bien un film fantastique, d’épouvante et d’horreur, tout en ayant sa propre identité bien confirmée. L’ignorer serait une grave erreur, un peu comme quand on a ignoré les débuts de Jaume Balaguero. Aujourd’hui, le renouveau vient du froid et avec « Morse » (et « Cold Prey », qui passe en ce moment sur canal Plus, ne le ratez pas !), il attaque fort avec un classique instantané du genre, un petit chef-d’œuvre qui fait tant de bien à voir.

St. THIELLEMENT



Retour au sommaire