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Sommaire - Interviews -  Franck Vestiel réalisateur/scénariste Eden Log


"Franck Vestiel réalisateur/scénariste Eden Log" de


EDEN L OG est un film d’anticipation, mais peut être pas dans le sens classique du terme....

Il existe une spéculation dans l’anticipation : celle de vouloir imaginer à quoi ressemblera la technologie
de demain. Pourquoi pas, mais la réponse coûte cher à l’image. Le fait est que le progrès prend très
souvent des voies insoupçonnées. Les Pulps de science fiction des années 40 ou 50, qui
représentaient l’âge d’or du genre, nous imaginaient conduire des voitures volantes en l’an 2000 et
communiquer avec des téléphones qui faisaient la taille d’un avant bras. C’était ça, la vision du futur à
l’époque. Ils n’avaient pas prévu qu’en 2000 on téléphonerait avec un objet de la taille d’un dé à
coudre mais que l’on continuerait de rouler. J’appartiens à la dernière génération à avoir fantasmé l’an
2000. Je me demande souvent à quoi ressemblent les fantasmes des gamins du XXIème siècle. Cette
spéculation technique est intéressante, mais elle est à mon sens à placer derrière les idées. Ce que
permet l’anticipation, c’est de pouvoir repérer un grain de sable dans la société d’aujourd’hui et
d’imaginer le cancer qu’il développera demain.

Ce grain de sable, dans EDEN LOG, c’est l’écologie...

Effectivement, il s’agit du rapport entre l’homme et la nature qui l’environne. Dans la nuit du 18 au 19
juin 2007 a eu lieu un événement mondial dont on a assez peu parlé : pour la première fois dans son
histoire, l’humanité habite majoritairement les villes. Aujourd’hui, l’homme se projette beaucoup plus
dans un milieu urbain que rural, et c’est la première fois de toute son existence que ce basculement se
produit. Le mouvement n’a aucune raison de s’arrêter, et certaines valeurs dans notre rapport à la
nature vont forcément se perdre. Jusqu’ici, nous avons toujours eu un grand oncle ou un grand père
qui possédait une maison à la campagne... Demain, la plupart des enfants n’auront plus de famille à la
campagne, et passeront leur temps entre la station balnéaire bétonnée et la ville dans laquelle ils
vivent. Pour la plupart des enfants des villes dont je fais partie, la nature se limite derrière des grilles
définies, fermées à partir d’une certaine heure, les pelouses sont interdites, etc. La nature est presque
perçue comme un simple objet décoratif. Cette perte de contact liée à la nature, même si le sujet est
très à la mode actuellement, ne peut que s’amplifier. On ne vit plus avec la nature, on la traite comme
un corps étranger qu’il faut protéger, préserver, mais auquel on ne s’intègre plus.

Pourquoi Clovis Cornillac était-il le seul
acteur qui pouvait jouer ce rôle ?

Quand je tournais avec lui pour la télé, j’étais
souvent fasciné par ses propositions de jeu
permanentes, il m’en arrivait d’oublier mon
propre travail d’assistant. On a partagé
beaucoup de discussions sur l’envie de faire du
cinéma, de se lancer là dedans, et c’est
vraiment le premier à m’avoir encouragé. Audelà
de ça, parmi tous les comédiens que je
connais, Clovis est celui dans lequel je me
projette le plus facilement. Je m’identifie
aisément à lui quand j’écris. Il a cette faculté de
vous faire croire qu’il est une personnalité
simple et abordable, que vous pouvez
facilement détourer. Pourtant, même pour moi
qui le connais un peu, il reste un mystère,
beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît.
J’espère que cette ambivalence se retrouve
dans le personnage.

Pour Clovis, il existe une différence très claire
entre les amis avec qui il aime passer du
temps et le boulot. Il ne mélange jamais les
deux, ne fera pas un film pour vous faire plaisir.
C’est très rassurant. Quand je lui ai donné le
scénario d’EDEN LOG j’ai attendu son coup de
fil d’après lecture comme n’importe quel
réalisateur. Nous nous sommes rencontrés sur
une série à laquelle je participais appelée
« Central Nuit », où il occupait le poste de
premier assistant. Malgré son côté très secret,
il y avait de l’affection entre nous, on était
contents de se retrouver sur le plateau. Franck,
c’est un protestant, mais pas dans le mauvais
sens du terme. Il était toujours très pudique
concernant ses envies de passer à la
réalisation. Quand le contrat qui me liait à la
série est arrivé à son terme, la chaîne, qui avait
obtenu de bons résultats, m’a demandé de
rempiler, ce qui ne m’intéressait pas. Il m’est
alors venu un truc assez dingue en tête, que je
ne regrette pas du tout aujourd’hui. Je leur ai
dit « Ok, je suis prêt à continuer à condition que
ce soit Franck qui réalise », alors que je savais
pertinemment que je ne pourrai pas le faire vu
que j’avais pris d’autres engagements au
cinéma. Malgré leur frilosité, ils ont accepté de
lui confier trois épisodes. Quand j’ai avoué aux
producteurs que je n’allais assurer que quatre
de mes 35 jours de tournage, Franck avait déjà
signé ses contrats et a pu diriger la série. Je
l’ai regardé s’emparer du plateau avec une
grande fierté. Ses épisodes ont été tellement
appréciés que les propositions pour faire de la
télé n’ont pas tardé à pleuvoir. Mais son
ambition était ailleurs, le poussait vers le
cinéma.




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