Il ne se déplaçait plus dans un univers ordonné par la logique, dans lequel le chasseur prenait ses armes et poursuivait sa proie. La réalité de la forêt s’était modifiée. Il marchait dans le monde des esprits, où l’homme était rarement le prédateur.

Tillu la guérisseuse vivait une existence sinon heureuse du moins stable. Puis Carp le shaman s’est intéressé à son fils Kerleu en qui il voyait un successeur possible. Décidé à ne pas laisser quelqu’un régenter l’existence de son fils, Tillu entreprit avec lui une fuite dans les étendues glacées (1) jusqu’à ce qu’elle rejoigne le Peuple des Rennes.
Ce peuple d’éleveurs et de chasseurs pourrait être prospère, heureux, mais en son sein quelques uns choisissent de faire le mal, par intérêt ou orgueil.
Ecrit sept ans avant le début du cycle de l’Assassin Royal cette saga est présentée comme un roman préhistorique. La mention du glouton, animal américain, pourrait nous renseigner sur le lieu de l’action. Par conséquent les populations évoquées pourraient constituer les ancêtres des Indiens. Mais il est mentionné au sud l’existence d’un peuple d’hommes roux habitant dans des maisons. De ce fait le contexte ne peut correspondre au passé du continent américain (2).
Ce premier tome de présentation reflète l’un des thèmes de Robin Hobb : l’installation progressive du mal que l’on retrouve régulièrement dans son oeuvre. Il s’installe parce qu’on le laisse faire. Les nobles de Castelcerf pourraient s’opposer à Royal, les marchands de Terrilville pourraient s’opposer à l’esclavage, les officiers de l’école de cavalerie pourraient s’opposer aux exactions contre la nouvelle noblesse. Personne ne fait rien. Le mal ordinaire, banal, se répand.

(1) Robin Hobb a vécu une grande partie de son enfance en Alaska
(2) De même le cycle de l’Assassin Royal pouvait se dérouler dans un monde d’héroïc-fantasy, mais le dernier tome nous procurait des indices nous informant de la possibilité d’un contexte postapoclyptique.

Damien Dhondt

Megan Lindholm (alias Robin Hobb) _ Le Peuple des Rennes tome 1 _ The Reindeer People, 1988 Traduction : Marysonne Ssossé _ Illustration : Meg Grant _ Pocket n° 5904, Collection : Fantaisy (mars 2008) _ Réédition, poche, 430 pages _ 7,70 euros