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Sommaire - Interviews -  Sherri S. Tepper


"Sherri S. Tepper" de Par Xavier Mauméjean


Si George W. Bush organise un pique-nique à la Maison-Blanche, il y a de fortes chances que Sheri S. Tepper ne soit pas la première invitée, même si elle apporte les bières. Née en 1929 à Denver, Colorado, mère de deux enfants, résidant actuellement à New Mexico, Tepper multiplie activités et identités, jusqu’à devenir insaisissable. A. J. Orde, E. E. Horlak, B. J. Oliphant, Sheri S. Eberhart, autant de pseudos qui contiennent difficilement la formidable énergie de l’auteure. Loin du verbiage démagogique et du militantisme mondain, Tepper mène conjointement combat social et réflexion littéraire ancrée dans un féminisme écologique auquel elle donne tout le souffle de l’épopée. Un caractère inflexible, incapable de concession, servi par une plume élégante et une indéfectible courtoisie. Rencontre avec une Inquisitrice de charme...


Avant tout, je voudrais saluer l’auteure de La Belle endormie (Beauty, 1991, trad J’ai Lu 1994), pour moi un chef-d’œuvre. Pourquoi avoir effectué cette relecture de La Belle au bois dormant (Sleeping Beauty) ?



Merci pour votre gentille remarque à propos de Beauty. Je n’avais pas l’idée, au départ, de réécrire La Belle au Bois Dormant. Je voulais parler de la beauté, sur terre comme de la beauté spirituelle que nous nous ingénions à détruire. Cette idée de destruction m’était insupportable, comme celle de la mort. D’ailleurs, nous préférons dire, “il s’est endormi pour toujours”, plutôt que de parler de “ mort ”. Le fait de “ dormir ” m’a amené vers La Belle au Bois Dormant... et cette histoire.


Vos personnages semblent toujours devoir s’affirmer contre l’ordre établi. Or vous avez beaucoup travaillé dans le social. Pensez-vous que la dignité se gagne contre la société ?


La société n’est pas immuable. Elle change, elle se transforme, elle “ devient ”, toujours en recherche de nouveauté, parce que les êtres vivants sont plus à l’aise dans l’ordre que dans le chaos. Si nos sociétés sont chaotiques, et elles le sont, leurs habitants désirent l’ordre plus que tout, et avec cet ordre vient la dignité, pour autant que l’ordre naisse naturellement et ne soit pas imposé par une quelconque tyrannie. Oui, la dignité doit être gagnée. Durement.


Marion Zimmer Bradley (La Romance de Ténébreuse) et vous-même tracez des voies très personnelles. Est-il abusif de parler de science-fiction “ féministe ” ?


Je suis une éco-féministe, du genre “ Mère Nature ”, je crois à l’épanouissement. Si vous jetez un œil sur l’administration américaine, vous découvrirez en W. Bush un parfait responsable business de Newholme. Il s’intéresse à la douleur des autres lorsque les caméras sont braquées sur lui. Puis, il revient aux affaires, il fore pour trouver du pétrole, il aide ses amis businessman à faire du profit, il laisse faire les pollueurs, sans se soucier des conséquences. Ce n’est pas de la SF, c’est la réalité.


Avec "Les Édits de l’Équité", La Danse des six lunes développe un concept intéressant : élargir la notion d’humanité à tout type d’intelligence manifestant raison et sensibilité. Chaque société développe ses propres singularités, à condition qu’elles ne nuisent pas aux modes de vie des autres groupes.


Haraldson donne un statut “ humain ” à toutes les intelligences et les chercheurs commencent à admettre que l’intelligence est un flux et non un mur qui sépare les humains des autres animaux. J’écris à propos de l’intelligence végétale dans Les Chiens, et il y a également de nombreuses intelligences de ce type dans Six Moon Dance.


Mais à la moindre incartade, la sanction tombe. N’est-ce pas une métaphore des minorités, raciales, homosexuelles, etc. Une nécessité au départ qui peut se renverser en dictature du politiquement correct ?


Non, Dieu m’en garde, c’est une attaque contre l’égocentrisme. Une attaque contre les gérontocrates qui décident ce que les femmes, les jeunes hommes et les enfants peuvent faire. Une attaque contre la société mâle dominante, qui opprime les femmes et les filles. Une attaque contre les groupements religieux qui se croient “ justes ” et pensent donc pouvoir dicter leur conduite aux autres. Une attaque contre les humains qui pensent qu’ils ont le droit de torturer des animaux.


Mœurs, politique, art, vos univers sont remarquablement cohérents. Vous semblez dire que nous subissons nos acquis culturels. Ne peut-on les modifier ?


De toute évidence, nous ne les construisons pas. Mais. Peut-être que plus tard, cela sera le cas.


Quels sont vos futurs projets ?


Je travaille actuellement sur un livre intitulé Les Chiens. Si les hommes ont créé des dieux à leur image, quel genre de dieu créerait des chiens ?





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