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Sommaire - Interviews -  Iain Banks


"Iain Banks" de Jérôme Vincent


C’est l’un des événements de la fin de l’année 2001. Iain Banks est de retour ! Avec Le Business, l’auteur d’Entrefer et du Cycle de la culture signe un livre pas franchement fantastique mais plutôt léger et satirique. Et l’on en redemande ! Loin des thématiques qui ont fait son succès, il tire à boulet rouge sur le capitalisme en mettant en scène une société semi-occulte qui prévoit d’acheter un pays tout entier. Ou quand un auteur s’élève avec humour contre le pouvoir tout puissant de l’argent. L’occasion pour nous de découvrir que le talent de cet écossais de 47 ans ne s’exerce pas seulement dans la science-fiction.


Quelle est l’origine du Business ?



Il y a deux choses. L’idée de la société semi-occulte du Business est venue d’un échange de lettres sur un de mes précédents romans. J’avais répondu en imaginant qu’il y avait autour de moi toute une organisation secrète pour, par exemple, payer les gens dans la rue pour lire mes livres... Un peu comme s’il y avait plusieurs Iain Banks : l’acteur de la vie publique, celui qui répond aux lettres, celui qui s’occupe du téléphone... et le vrai Iain Banks attaché à son bureau dans un grenier pour écrire ses histoires (rires). Pour le ton léger du livre, il faut relier Le Business à mon dernier roman non SF : Le Chant de la pierre. Celui-ci était très triste, très sombre. Cela aurait été dur de recommencer un livre aussi sérieux et pessimiste juste après. C’est la raison pour laquelle il faut vraiment chercher pour trouver un peu de sérieux dans Le Business.


Apparemment, de nombreuses personnes ont trouvé ce sérieux dans la satire sous-jacente du capitalisme. Peut-on dire que c’est une légère mise en garde ?


Oui mais c’est un anticapitalisme assez bénin. Les gens de cette société semi-secrète n’assassinent personne et il y a très peu de corruption. Ce n’est pas si terrible. J’ai été assez indulgent. Dans un sens, cela présente une image assez improbable et gentille d’une telle société et du capitalisme. Bien sûr cela n’existe pas.


Qu’aimeriez-vous que le lecteur ressente en fermant le livre ? Qu’il garde le message un peu anticapitaliste ou qu’il se soit tout simplement bien amusé ?


J’aimerais surtout qu’il se dise : “Oh, mais il faut que je lise plus de livres de Iain Banks” (rires). En fait, cela ne me préoccupe pas vraiment. La réaction du lecteur ne m’appartient pas. Je ne fais que produire mon livre.


Est-ce facile de se mettre dans la peau d’une femme ?


Non. C’était juste se mettre dans la peau d’une personne proche de moi comme ma femme ou des amies. Cela aurait été probablement plus difficile de s’imaginer à la place d’un homosexuel par exemple parce que nous ne vivons pas les mêmes choses dans les mêmes milieux. Et puis, Kate est une fille épatante. Elle est sûrement plus intelligente que moi et en fait, je suis un peu tombé amoureux d’elle. Mais juste un peu. Cela reste raisonnable (rire).


Une nouvelle fois dans ce livre, vous avez une héroïne un peu en marge. Avez-vous un problème avec la “norme” ?


Je suppose que oui. Techniquement, avoir un personnage en marge me permet de lui donner plus de recul par rapport au monde auquel il appartient. Mais vous pouvez aussi avoir une explication psychologique. Je suis enfant unique, j’habite l’Écosse, une région en marge de l’Angleterre, elle-même en marge de l’Europe... (rire). Plus sérieusement, je pense que tous les auteurs, tous les artistes doivent se positionner un peu en dehors de la société pour pouvoir porter un jugement sur celle-ci. Par exemple en ce moment l’Angleterre est complètement folle du Football et dans mon prochain livre, je propose qu’on réduise la coupe du monde à une seule journée de tirs au but. Cela irait plus vite et l’on serait plus tranquille.


La fin de Business est assez ouverte. On sent qu’il peut encore s’y passer des choses. Y aura-t-il une suite ?


Il y a très peu de chance. Je n’aime pas beaucoup faire des suites. Je préfère me consacrer à de nouveaux projets.


Votre prochain livre sera plus sérieux ?


Oui certainement ! Le prochain parle d’un écossais habitant à Londres et qui anime une émission de radio assez provocatrice. En général, ce type d’animateur en Angleterre comme aux États-Unis est plutôt de droite. Je me suis donc amusé à en imaginer un de gauche qui, par conséquent, va avoir beaucoup d’ennemis. Par exemple, il va satiriser les révisionnistes de la Seconde Guerre mondiale. Ça se terminera sur un plateau de télé où il sera confronté à un véritable révisionniste. Et au lieu de discuter, il lui mettra un coup de poing avant de nier l’avoir mis.


Le prochain sera donc un roman de littérature générale tout comme Le Business et Le Chant de la pierre. Rassurez-nous, vous n’êtes pas fâché avec la science-fiction ?


Non bien sûr (rire). Entre le Business et le prochain, j’ai écrit un roman de science-fiction. Et celui d’après sera de nouveau de la SF même si je n’ai pas encore la moindre idée du sujet (rires).


Faites-vous un travail différent entre la SF et la littérature générale ?


Je ne le pense pas. Ce sont à chaque fois des histoires avec des personnages, une intrigue, des dialogues... C’est pareil. On pourrait presque trouver plus de différences entre deux de mes romans de littérature générale qu’entre un roman de SF et un plus classique. En fait je préfère écrire de la science-fiction. Cela me laisse plus de liberté. Je peux y faire tout ce que je veux. Même faire exploser l’univers si j’en ai envie. Et puis mon éditeur s’y connaît moins bien en science-fiction. J’ai donc moins de critiques de sa part (rires).


Vous avez deux signatures entre SF, Iain M. Banks, et littérature générale, Iain Banks. Pourquoi ?


Il y a deux raisons. La première était qu’à mes débuts, une partie de ma famille était un peu désolée que je signe sans mon nom du milieu. La seconde était pour que le lecteur fasse la différence entre mes bouquins. Qu’il n’achète pas un livre de SF pensant que ce serait un livre de littérature générale. Mais depuis je le regrette parce que j’ai l’impression que ça renforce la conception très anglaise et un peu snob des milieux littéraires qui considèrent la SF comme un sous-genre.


Avec votre carrière littéraire et votre succès, qu’est-ce que l’on peut souhaiter à Iain Banks aujourd’hui ?


Ça, c’est une question facile : une Ferrari... (rire). Non surtout continuer à écrire des livres. Maintenant que j’ai réussi à attirer l’attention d’un certain nombre de lecteurs, j’ai envie de raconter de nouvelles histoires et de leur dire : “voilà comment je vois le monde”. Quant au succès, il faudrait demander à mes amis si j’ai changé. Ils m’ont toujours dit que j’étais un peu mégalomane et ambitieux. Finalement c’est juste la réalité qui a rejoint mes espérances (rires)


Vous vous souvenez de vos premiers pas dans l’écriture ?


Oui bien sûr. J’ai écrit mon premier livre vers quatorze ans, mais c’était un peu léger... Le premier “vrai” roman, c’était vers 16 ans. Et puis il y en a eu 4 ou 5 ensuite, soit environ un million de mots avant de publier le premier livre. Je voulais être un auteur depuis mes 11 ans. J’ai un cahier de cette époque dans lequel j’avais déjà commencé à écrire.


Y a-t-il des livres qui vous ont marqué ?


En fait, lorsqu’un auteur a trouvé sa propre voie dans l’écriture, il n’a plus envie d’être influencé. Mes références remontent donc assez loin, à l’enfance. Je peux citer de nombreux auteurs de SF qui m’ont marqué comme Arthur C. Clarke, Heinlein, Asimov... ainsi que des auteurs de littérature générale comme Kafka. Et puis il y a de nombreux écrivains dont j’aimerais penser avoir été influencé. Mais ce n’est probablement pas le cas (rire). En dehors de la littérature, les Marx Brother ou les Monthy Python compte aussi parmi mes références.





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