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Sommaire - Interviews -  Li-An


"Li-An" de Patrice Maris


 

« Fantômes blancs » vient juste de paraître chez Vents d’Ouest. Il y est question de François, un jeune homme qui, après avoir longuement séjourné en métropole, décide avec un ami de revenir vivre dans la maison de son enfance sur une île du Sud.
Une histoire qui serait somme toute banale s’il n’y était aussi notamment question du fantôme d’un pirate et d’un mystérieux trésor...
En tout cas, l’occasion de rencontrer un dessinateur aussi sensible qu’attachant, Li-An qui signe ici sa première véritable collaboration en album avec le scénariste Appollo...

« Fantômes blancs », ton dernier album, vient tout juste de sortir dans les librairies et marque ton retour après une longue absence auprès des Editions Vents d’Ouest. En effet, la maison d’édition avait déjà publié en 1993 « Santa Dominica », un court récit intégré au sein du recueil « 7 histoires de pirates ». Bizarrement, dans ces deux histoires, il est question de flibustiers. Une simple coïncidence ?

Pas tout à fait... "7 histoires de pirates" est un projet monté par Mad qui travaillait à l’époque avec Appollo pour Vents d’Ouest. Il devait y avoir plusieurs albums avec des thèmes variés mais la mort de Mad et le peu de succès rencontré par ce premier volume (mal géré) a mis fin à l’aventure. Appollo et Mad étaient fans de pirates : il était normal qu’Appollo (qui a par ailleurs beaucoup d’autres thèmes à son arc) me fasse un scénario où des pirates apparaissent.
Pour ce qui est d’être publié chez Vents d’Ouest, ça tient un peu au hasard même si le fait d’avoir déjà tavaillé avec eux a dû vaguement aider.

« Fantômes blancs » est aussi le fruit d’une première collaboration en album avec le scénariste Appollo (« Les aventures de Louis Ferdinand Quincampoix », « La Grippe Coloniale », ...). Comment est née cette envie de travailler ensemble et, en particulier, comment a germé l’idée de créer « Fantômes blancs » ?

Je connais Appollo depuis 20 ans à l’époque de la création du fameux fanzine réunionnais "le Cri du Margouillat". J’y ai d’ailleurs illustré un de ses scénarios. Nous sommes toujours restés en contact... Cela faisait quelques années qu’Appollo cherchait à m’écrire quelque chose et nous avons essayé régulièrement de monter des projets en commun...
Après la réussite de la Grippe Coloniale (album publié aussi chez Vents d’Ouest) et les refus rencontrés par mes projets personnels, cela semblait une bonne chose que de relancer la machine, avec succès cette fois-ci.

Ta façon de travailler avec Appollo est-elle sensiblement différente de celle avec laquelle tu œuvres d’habitude avec Jean-David Morvan (« Sillage », « Troll », « Nomad », « HK », ...), en quelque sorte ton scénariste attitré, puisque tu prépares avec lui actuellement déjà le septième tome de l’adaptation en bd du « Cycle de Tschaï » de Jack Vance ?

C’est le jour et la nuit. Jean-David gère énormément de séries (dont Spirou qui demande beaucoup d’investissement) et commente très sobrement mes planches. Il me fait confiance globalement au niveau découpage et dessin.
Appollo s’implique beaucoup plus dans ses projets. Il a besoin d’un échange constant, de commentaires de ma part, etc. Ça se traduit par une note de téléphone carabinée... Contrairement avec Jean-David, je lui montre un découpage crayonné qu’il valide avant encrage.

L’île où se passe l’action de « Fantômes blancs » n’est pas clairement définie mais on devine qu’il pourrait s’agir de la Réunion, un endroit où vit d’ailleurs actuellement Appollo et où, il me semble, tu as séjourné. Serait-ce un attachement tout particulier à cette île qui vous à conduit à situer le contexte de l’action à cet endroit ? Que t’inspire en fait cet endroit ?

J’ai vécu 10 ans à la Réunion et c’est probablement l’endroit qui m’a le plus marqué (en tant que fils de militaire, j’ai beaucoup voyagé). J’y ai vécu en tant que lycéen, puis étudiant et enfin enseignant avec à
chaque fois des coupures de quelques années. Du coup, c’est devenu une sorte de point de stabilité, de référence et chacun de mes séjours s’est révélé déterminant sur le plan personnel . J’y retourne régulièrement avec beaucoup de nostalgie car c’est un endroit en pleine mutation.
Pour ce qui est de la BD, il n’y a pas une volonté de ne parler que de la Réunion mais Appollo lit énormément de choses sur l’histoire de l’île et il trouve dommage que ce fond très riche en personnages et faits marquants reste confidentiel.
"Fantôme blancs" ne se déroule pas spécifiquement à la Réunion parce que l’histoire ne traite pas d’un fait historique précis qui se serait déroulé sur l’île. Le décor, les personnages, la culture sont largement inspirés de la Réunion mais le thème est plus général et l’action aurait pu avoir lieu en Louisiane ou dns les Antilles.

Le héros de « Fantômes blancs », François, semble avoir une nature rêveuse, contemplative... De façon générale, il est d’ailleurs bien difficile de discerner la réalité des fantasmes du héros dans ce premier album... François, en tout cas, ne ressemble pas à Adam Reith, personnage principal du « Cycle de Tschaï », un héros pur et dur, bien inscrit dans l’action... Penses-tu qu’un héros cmme François te donne plus de liberté narrative ?

Dans les deux cas, ce sont des personnages un peu étrangers à leur environnement (même si c’est de manière très différente. Reith, dans Tschaï, est l’élément étranger qui perturbe un équilibre, François est
perturbé par ce qui l’entoure) et l’action fonctionne en grande partie sur les rencontres qu’ils font.
Assez curieusement, Adam Reith, qui est toujours dans l’action, est moins impliqué dans l’histoire à mon sens : il est le révélateur du monde qu’il découvre alors que François est réellement le centre de l’histoire. Comme tu l’as bien souligné, ce sont ses perceptions du monde extérieur qui sont iportantes. Dans Tschaï, Adam est un témoin objectif de l’univers qu’il visite.
Pour ce qui est de la narration, je suis confronté à deux philosophies très différentes, avec d’un côté de l’aventure adaptée d’un roman dont la trame globale s’impose, de l’autre, un scénario plus "personnel" qui laisse plus d’espace pour s’exprimer. Les deux ont leurs avantages et leurs inconvénients.

Pour être plus précis, « Fantômes blancs » est plutôt une série dont vient juste de paraître le premier tome. Quand on sait que « le Cycle de Tschaï » est prévu en huit tomes et qu’auparavant, « Planète Lointaine », paru en 1998 chez Delcourt, faisait 192 pages (il était d’ailleurs question à un certain moment qu’une suite en soit donnée), peut-on penser qu’en
tant que dessinateur, tu te sens plus à l’aise avec des récits au long cours ? Qu’est-ce qui explique cela, selon toi
 ?

Il n’y a que deux tomes de prévu à "Fantômes", ce n’est donc pas un projet pharaonique.
Avec "Planète Lointaine", j’ai découvert qu’il me fallait beaucoup de place pour raconter des choses mais ça n’a rien d’exceptionnel : le manga fonctionne sur ce genre de rythme et la "nouvelle bande dessinée" revendique cette liberté. Je n’ai pas choisi le Cycle de Tschaï pour sa longueur mais parce que j’aimais l’univers de Vance. Je me crois capable de faire des histoires en 46 planches si le scénario me plaît.

Pour conclure, veux-tu nous faire part de tes prochains projets en matière de bd ?

Finir Tschaï et Fantômes, développer mes propres histoires, retravailler avec Appollo et Jean-David et me laisser de la place pour d’autres rencontres.
Il me faudra plusieurs vies pour tout réaliser en espérant que les lecteurs et les éditeurs me suivront...

On ne peut que te le souhaiter. Encore merci pour cet entretien...

Propos recueillis par Patrice Maris




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