Scénariste : Joel Coen & Ethan Coen & Richard LaGravenese & William Nicholson
Avec : Jack O’Connell, Domhnall Gleeson, Miyavi, Finn Wittrock
Distribué par Universal Pictures International France
138 mn - Sortie le 7 Janvier 2015 - Note : 9/10

Pour le public, Angelina Jolie est d’abord, avant tout, voire uniquement, une actrice. Sauf qu’elle a déjà signé un film, « Au pays du sang et du miel ». Et même si elle continue son métier d’origine, on sent que passer derrière la caméra semble lui procurer bien plus de plaisirs. La preuve en est ce surprenant « Invincible », aux qualités techniques indéniables, pour un scénario pourtant pas du tout évident à concrétiser en film.
Louis Zamperini aurait pu mal tourner. Enfant, il est souvent au cœur de bagarres ou de petite délinquance qui lui vaut souvent d’être ramené chez lui par un policier. C’est son grand frère qui va pousser Louis vers le droit chemin, en l’initiant au sport, et plus précisément à la course à pieds. Au point que le jeune Zamperini représentera les USA aux JO de Berlin en 1936. Mais la guerre survient, et Louis s’engage. Il est mitrailleur dans un bombardier et un jour, l’avion s’écrase en pleine mer, laissant trois survivants dont le jeune Louie. C’est là que va commencer l’extraordinaire destin de cet homme qui n’a jamais fléchi, se tenant toujours debout même dans les pires situations ordonnées par ses geôliers, et ce jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale...
L’accroche « inspirée d’une histoire vraie » peut - légitimement parfois... - nous repousser à voir un film. Celle de « Invincible » est vraie, et elle ne peut que susciter un ensemble de réactions qui va de l’admiration à l’émotion en passant par la colère voir pire. Zamperini a d’abord passé un mois et demi sur un canot en plein océan après le naufrage de son avion. Puis, « recueilli » par les Japonais, il est envoyé dans un camp où un gradé psychopathe le prend en grippe et lui fera subir des mois durant et même dans un autre camp où malgré sa mutation, il retrouvera Zamperini, diverses formes de torture psychologique et même physique parfois. Mis l’homme a pourtant tenu tête, ne se « couchant » jamais, continuant à puiser en lui la volonté d’y arriver. C’est de cela qu’Angelina Jolie traite dans son film, s’axant sur le naufrage et l’abominable confrontation entre un prisonnier et son bourreau. On pourrait reprocher une pointe de complaisance sadique, avant de comprendre son intérêt dans ce film. Angelina Jolie montre alors de réelles qualités de mise en scène et de réalisation, où l’horreur des souffrances se superpose aux beautés naturelles des lieux entourant les camps, où la volonté de ne pas céder livre bataille à la résignation d’abandon pour ne plus avoir à souffrir, où à force de bien appuyer - au point d’être limite « complaisant » - sur ces manifestations de sadique, Angelina Jolie finit simplement par nous restituer comme peu l’avaient réussi jusqu’ici l’horreur de ce quotidien en plein enfer. Menant de main de maître son projet, l’actrice montre et confirme ici ses réels talents dans le milieu. S’entourant de grands noms (Roger Deakins à la photo, Alexandre Desplats à la musique) et d’acteurs moins connus (Jack O’Conell, pourtant vu récemment dans « La tete contre les murs », « ’71 », découvert dans le glauque et réussi « Eden Lake »), Angelina Jolie réussit son second essai, au-delà de toutes espérances, tant son « Invincible » ne peut que susciter l’admiration quant à la force de caractère de son héros, Louis Zamperini. Un sujet qui l’a passionné, comme on peut le vérifier à l’écran : Angelina Jolie est définitivement devenue une réalisatrice, et elle gagne ses galons avec tous les honneurs dignes des plus grands.

Stéphane THIELLEMENT