SF Mag
     
Directeur : Alain Pelosato
Sommaires des anciens Nos
  
       ABONNEMENT
Sfmag No122
118

11
F
é
v
RETOUR à L'ACCUEIL
BD   CINÉ   COUV.   DOSSIERS   DVD   E-BOOKS  
HORS SERIES    INTERVIEWS   JEUX   LIVRES  
NOUVELLES   TV   Zbis   sfm   CINÉ-VIDÉOS
Encyclopédie de l'Imaginaire, 18 000 articles
  Sommaire - Films -  G - L -  Gravity
Voir 103 livres sur le cinéma, romans, études, histoire, sociologie...

"Gravity" de Alfonso Cuaron

Scénario : Alfonso Cuarón, Jonás Cuarón et Rodrigo García
Dates de sortie :
États-Unis États-Unis : 4 octobre 2013
France : 23 octobre 2013
Avec :
Sandra Bullock (V. F. : Françoise Cadol ; V.Q. : Hélène Mondoux) : Dr Ryan Stone
George Clooney (V. F. : Samuel Labarthe ; V.Q. : Daniel Picard) : Matt Kowalski
Ed Harris (V. F. : Hervé Bellon ; V.Q. : Éric Gaudry) : Centre de contrôle de la Nasa (voix)
Orto Ignatiussen : Aningaaq (voix)
Phaldut Sharma (V. F. : Asil Rais) : Shariff (voix)
Amy Warren (V. F. : Pauline Larrieu) : le capitaine de l’Explorer (voix)
Basher Savage : le capitaine russe de la station spatiale (voix)

Voici sans doute le film-évènement de la rentrée 2013. Un de ces blockbusters américains à 100 millions de dollars et seulement deux acteurs au générique - fussent-ils aussi bankables que Georges Clooney et Sandra Bullock. Car ici les vraies stars sont d’abord les étoiles et l’espace cosmique qui entoure la Terre. Les étoiles ou plutôt leurs images de synthèse, héritières des vieux effets spéciaux qui nécessitent désormais le port de lunettes 3D pour qui veut profiter pleinement du spectacle. Ce sont ces fameuses images, fleurs d’une technologie de plus en plus banalisée, qui recréent à l’écran les conditions de vie en apesanteur avec un réalisme assez époustouflant. Car contre toute attente, « Gravity » est moins un film de science-fiction qu’un film à prétention réaliste sur ce qui se pourrait se passer si une mission spatiale de maintenance virait à la catastrophe, avec des astronautes livrés à eux-mêmes pour assurer leur sauvetage. Pas de milieu plus invivable, en effet, que l’espace, avec ses multiples débris qui circulent à très vive allure, sa nuit éternelle, son absence d’oxygène et ses émissions délétères de rayons stellaires. Avec ce scénario aussi mince que dense, Alfonso Cuaron - déjà auteur des « Fils de l’homme », en 2006 - n’en a pas moins construit une œuvre d’une rare puissance visuelle, mélange de beauté et de terreur dans lequel Kant voyait l’essence du sublime. Durant une heure trente, le spectateur ne peut que s’identifier à l’un ou l’autre de ces exilés absolus. Projeté par la « magie » du cinéma dans une situation qu’il n’a jamais vécue (et ne vivra jamais), il n’en ressent pas moins leur angoisse au plus profond de lui-même, participe à toutes les étapes de cette évasion inédite où l’intelligence est de loin privilégiée sur les muscles. Empathie plus que catharsis, car aucune passion malsaine ne risque de trouver sa purgation ici, et surtout pas l’attrait pour la silhouette parfaite de Sandra Bullock qui évolue, à l’intérieur de la navette spatiale, avec la grâce d’une sirène. Bon, il n’y aura pas d’histoire d’amour entre le docteur Ryan Stone et le commandant Matt Kowalski (même si Clooney entame par moments son numéro de charme). Et tous les protagonistes de cette troublante histoire ne seront pas sauvés. Il est d’ailleurs significatif que ce soit le personnage féminin qui retrouve le chemin vers la gravité de notre vieille Terre, cette planète pas toujours hospitalière mais qui reste, sans doute pour très longtemps, la seule que nous puissions habiter sans efforts surhumains.
Cette précision quasi documentariste est, à la fois, la force et la faiblesse du film d’Alfonso Cuaron. Car, malgré la présence constante ou successive des quatre éléments (air, feu, eau, terre), malgré sa vision moderniste de la dyade homme-femme, « Gravity » manque d’une vraie dimension symbolique. On y chercherait en vain cette poésie visuelle qui fait encore tout le charme de « 2001, l’odyssée de l’espace », chef-d’œuvre indépassé de la science-fiction au meilleur sens du terme. Il serait quand même dommage de bouder pour ce seul motif cette invitation à l’aventure extra-terrestre dans un fauteuil.

Jacques LUCCHESI

Voir également la chronique de Stéphane Thiellement dans la même rubrique



Retour au sommaire